Ce blog rassemble des informations et des réflexions sur l'avenir qui nous attend.

This blog presents informations and views about the future.

jeudi 4 août 2016

La gouvernance par les nombres / Governance by numbers

The book of the eminent French jurist Alain Supiot, entitled "Governance by numbers", which stems from the lectures he gave at the Collège de France from 2012 to 2014, helps to understand to day's world. Alain Supiot analyzes the differences between the concept of government and the concept of governance. While a government takes decisions which commit the future of the nation, governance is only guided by corporate management rules. The economic system is supposed to be self-organised through the Market rules and to operate according to the cybernetic model of a computer. As a result, choices are made according to numerical criteria. Such a governance by numbers is uncompatible with the welfare state which was widespread in Europe. Whereas the welfare state resulted from the modern utopia of an universal protection ensured by a central authority, governance by numbers can be described as the postmodern utopia described by Gilles Deleuze et Félix Guattari of a rhisomatic system, excluding any kind of heteronomy,  Governance by numbers undermines democracy itself, as decisions do not depend any more on the voting process and drags backward social law. As individuals are no more protected by the State, they have to owe allegiance to those who are powerful. Instead of liberating the society, governance involves a new kind of feodality.

L'ouvrage du distingué juriste qu'est Alain Supiot intitulé "La Gouvernance par les nombres" reprend le contenu du cours qu'il a donné au Collège de France de 2012 à 2014. C'est un ouvrage important pour comprendre le Monde d'aujourd'hui. Alain Supiot analyse les différences fondamentales entre les principes de gouvernement et la gouvernance telle qu'elle a été mise en place, à la suite du mouvement de dérégulation des années 90, qui a mené à l'ultralibéralisme actuel. Alors qu'un gouvernement prend des décisions qui engagent l'avenir de la nation, la gouvernance s'inspire des principes de gestion appliqués dans le monde des entreprises. Le système économique étant supposé auto-organisé par l'application des lois du Marché, il suffit d'appliquer des règles de bonne gestion, pour qu'il puisse fonctionner. "Le modèle physico-mécanique de l'horloge, qui avait partie liée avec l'idée de règne de la loi, a été supplanté par le modèle cybernétique de l'ordinateur".Ce modèle a mis en péril le compromis social-démocrate, répandu en Europe, fondé d’une part sur le respect de la concurrence de l’économie de marché, et d’autre part sur une politique aussi étendue que possible de protection sociale. L’utopie moderne de l’Etat-providence est remplacée par l’utopie postmoderne d’un modèle rhizomatique déjà annoncé par Gilles Deleuze et Félix Guattari dans Mille plateaux, excluant toute forme d’hétéronomie dans l’organisation sociale. Dans un tel modèle, la décision politique est remplacée par les procédures économiques opérées dans le cadre du Marché. Ces procédures sont fixées en fonction de critères numériques. "La gouvernance par les lois n'implique pas la disparition des lois, mais la soumission de leur contenu à un calcul d'utilités".
   De ce fait, la démocratie est vidée de sa substance, puisque les choix qui engagent l'avenir échappent totalement au scrutin électoral. Alain Supiot montre par ailleurs le recul considérable qui en résulte en matière de Droit social. La  protection des citoyens n'étant plus assurée par l'Etat, le seul moyen de se protéger consiste à accepter des liens d'allégeance vis à vis des plus forts. Loin de libérer la société, la gouvernance implique une nouvelle forme de féodalité.

vendredi 8 juillet 2016

Le rapport Meadows 45 ans plus tard / The Meadows report 45 years later

The Meadows report was initially published in 1972. Entitled "The Limits to Growth", it forecast a collapse of the world economic system, due to the rarefaction of natural resources as a result of the GDP exponential growth. It was a pionieering work, dealing with a global system including the whole world and its environment. It introduced also the concept of "collapse", which has become familiar with the book published by Jared Diamond. It was strongly opposed by most economists and those who perceived it as a threat for their business. The concept of sustainable development was introduced, in order to show that development is acceptable if it remains virtuous enough.  The idea of green growth intended to transform a threat into an opportunity. The Meadows report is very timely and challenling presently, as the turndown it predicted should occur quite soon. The simulation operated with theWorld3 model forecast a beginning of collapse for the world economy by 2015 and a drop of the world population resulting from a lack of resources towards 2030. It is therefore quitev appropriate to investigate quite carefully the results of the report, as recommended by Gaël Giraud, Chief Economist of the French Agency for Development (AFD). In fact, most of the recent work tends to confirm the conclusions of the report. The evolution followed during forty years, is in rather good accordance with  the evolution predicted. It is still too early to  check the evolution predicted during the downfall period, although the beginning of the economic crisis in the Western countries can be related to some extent to a rarefaction of oil resources. Supplementary negative factors, which were not taken into account in the Meadows report have to be taken into account, including global warming and a demographic transition slower than initially anticipated. It seems therefore essential to revisit carefully the conclusions of the report and to undertake appropriate actions, in order to reduce the consumption of natural resources and to prevent further environment and land degradation.

Le rapport Meadows a été publié en 1972 et date déjà de près d'un demi-siècle. Intitulé "Les limites de la croissance" (traduit en français sous le titre "Halte à la croissance"), il prévoyait un effondrement du système technico-économique mondial, sous l'effet de la raréfaction progressive des ressources disponibles, causée par la croissance exponentielle du PIB et de la consommation corrélative de ressources. Ce rapport était particulièrement novateur, car il envisageait pour la première fois l'ensemble formé par l'économie et l'environnement comme un système mondial. Il introduisait également l'idée d'effondrement qui était mal perçue à l'époque et qui a été depuis popularisée par Jared Diamond.  Ce rapport fut vivement combattu d'une part par les économistes qui admettaient mal cette incursion sur des territoires qu'ils prétendaient bien balisés et par tous ceux qui voyaient dans ce document une menace à l'égard de leur manière d'agir et donc de leurs intérêts. Le concept de développement durable fut inventé pour contourner l'obstacle en décrétant que la croissance était acceptable, à condition d'être suffisamment vertueuse.. De la même façon, il est question à présent de croissance verte, afin de transformer les obstacles en "opportunités".
Le rapport Meadows est particulièrement actuel, du fait que ses prédictions pessimistes viennent à échéance. En effet, le modèle World3 prévoyait un début de chute de l'économie mondiale vers 2015 et un début de chute de la population mondiale par manque de ressources vers 2030. C'est pourquoi, il est particulièrement important, comme le souligne Gaël Giraud, de revisiter aujourd'hui les conclusions de ce rapport.

mercredi 6 juillet 2016

Découpler la prospérité de la consommation de ressources / Decoupling prosperity from the consumption of resources

The world is facing two major challenges: the exhaustion of natural resources and the rise of unemployement due to the growth of digital technologies and automation. It is therefore necessary to develop new sectors of activities, without increasing the consumption of resources. Even the intellectual work is threatened by the rise of Artificial Intelligence (AI). Still, creation is going to play an increasing role in the future. Creation will play an essential role in all areas, including thel activities related to everyday life, such as housing or clothing. The value of creative activities is not measured by the amount of work which they require, but by the social utility they can bring. The treatment of Data, especially Big Data, will require powerful computers, but also highly skilled work, rather than more resources. Care activities are also strongly needed. A heartful welcome in an administration, good medical attention create value without consuming more resources. Education, heath, environment, justice require qualification and skills. The value of services provided is not measured only by the amount of time spent, nor is it related to the GDP, which means that it is possible to bring more prosperity without growth. Such activities can also provide more jobs. It does not mean that the issues related to the consumption of natural resources would be solved, as it will remain possible to produce more goods within automated factories. Thus a deeper transformation will be required in the way of life, using new regulatory and organizational tools, to deal with this issue.

Le monde est confronté à deux graves problèmes: d'une part l'épuisement des ressources et d'autre part la montée du chômage liée à l'essor des technologies numériques. Il est donc nécessaire de développer de nouveaux secteurs d'activités, qui ne se traduisent pas par un accroissement de la consommation de ressources. Le travail intellectuel, qui occupe désormais une place prépondérante par rapport au travail physique, est lui-même menacé par les progrès de l'information et de l'Intelligence Artificielle (IA). Demain, le développement de l’Intelligence Artificielle pourrait contribuer à supprimer une large partie des emplois intellectuels, de la même façon que les machines ont supprimé la quasi-totalité des emplois physiques. Toutefois, les activités de création vont prendre une place croissante.  La création  ne se confond pas avec la quantité de travail, effectué, même intellectuel. La valeur que représentait l'invention de l’ampoule électrique ou du transistor était totalement sans rapport avec la quantité de travail qu'elle avait requis.La valeur créée est dans ce cas découplée de la consommation de ressources. La création couvre aussi tout le domaine de la production de biens culturels, littéraires ou artistiques, qui peut se traduire pour une part en une contribution au PNB, mais ne se limite pas à cela. Elle s'étend à tous les secteurs, notamment ceux qui concernent la vie de tous les jours (habitat, alimentation, vêtements). L’information, les données (Data) font partie des facteurs immatériels qui créent de la valeur et devraient se développer considérablement à travers le traitement des « Big data ». Le savoir associé à la création permet de comprendre et d’innover. Le traitement des données implique l'utilisation de technologies numériques de plus en plus puissantes. Toutefois le travail d'interprétation et de synthèse va nécessiter des ressources humaines importantes.

dimanche 19 juin 2016

De la société automatique à la société de création / From the automatic society to the creative society


Digital technologies and artificial intelligence robotize and automate an ever increasing number of tasks. The result is not only the risk of massive unemployment, but also a deshumanization of the society. This evolution, which aims at maximizing the profits, destroys the human society. The  automatic society immerses each person in a world of machines unable to understand his specific needs. It supplies standard products, which are duplicated all around the world. It suppresses not only the possibility to work, but also the faculty of thinking and dreaming. The transformation to be accomplished now consists in a deautomatization of the society in order to restore the ability to act, to think and to dream in an independent way. Within the creative society, knowledge and intangibles become predominant. The nature of work is transformed, from endured to chosen. Rather than being automatized and energy intensive, industrial or agricultural production is preferably operated at a smaller scale, in a creative and diversified way.  Creation is deployed in every sector of activity. Everybody is involved in the co-creation of new organisational practices in order to make life easier and more beautiful. Technology remains present but is unobtrusive. Its inspiration is often biomimetic. Each object is designed in order to become a source of beauty and inspiration. Enlighned by spirit and consciousness, creativity is not only a form of virtuosity but becomes a source of meaning, harmony and beauty

Les technologies numériques et l’intelligence artificielle robotisent et automatisent un nombre de tâches sans cesse croissant. Il en résulte non seulement une augmentation accélérée du chômage, mais aussi une déshumanisation de la société. Cette évolution, qui vise à maximiser les profits, détruit la société humaine. La société automatique plonge l’individu dans un monde de machines incapables de comprendre ses besoins spécifiques. Elle lui fournit des produits standardisés, dupliqués d’un bout à l’autre de la planète. Elle lui enlève non seulement son travail, mais aussi la faculté de penser et de rêver. Le retournement à accomplir consiste donc à désautomatiser la société par une « redistribution massive du temps de songer ». Les activités de production étant de plus en plus déléguées à des machines, une société de création peut se déployer. Dans une telle société, le savoir et les biens immatériels prennent une place prédominante. La nature du travail évolue, passant d’un travail subi à un travail voulu. Au lieu d'être automatisée et intensive en ressources ainsi qu'en énergie, la production est menée à petite échelle, de façon créative et diversifiée. La création investit les domaines les plus variés de l’alimentation, de la confection de vêtements ou d’objets. Elle invente de nouvelles pratiques agricoles, telles que la permaculture ou commerciales, pour aider l’usager à utiliser intelligemment les produits ou équipements auxquels il fait appel. Elle rétablit des relations personnelles au sein des administrations, des entreprises ou des villes. Chacun est invité à co-créer de nouveaux modes d’organisation pour rendre la vie plus belle et plus agréable. Le rôle de la créativité ne consiste pas seulement à alimenter le marché en innovations technologiques., mais représente également une voie de progression dans les domaines spirituel, culturel, artistique et scientifique.  

samedi 28 mai 2016

Le Principe Espérance / The Principle of Hope

It is a mere evidence that technical and economic factors induce rapid social changes.  Digital technologies reshape everyday life and the organization of our society. They influence the way economy is operating. These changes can play a liberating role, but they have also resulted into the flat world of globalization. In a society dominated by objects, the inflation of matter has lead to a weakening of culture and social cohesion. The power of arms destroys whole countries. In such a world which seems dominated by matter, the weak signals of  a cultural and spiritual renewal can be detected.   The search of a more authentic life and of an empathic connection with all living beings responds to the risks of dehumanization through a reckless use of technologies. Collective action can find a meaning only through the emergence of such a spiritual renewal, which can compensate the spreading of the mainstream pseudoculture. The world is still full of sound and fury. It would be naïve to imagine a world liberated from from hatred and lies. No rational argument can ensure us that the will to build a better world will prevail upon the will of power. But if we consider Hope as a virtue, it becomes legitimate to bet on such an hypothesis. In the face of disasters, catastrophes and wars, it remains possible to adopt the Principle of Hope advocated by the philosopher Ernst Bloch, for trying to build a better world.

Constater que les facteurs technico-économiques induisent des transformations rapides dans le monde actuel relève d’une simple évidence. Les technologies numériques bouleversent les modes de vie quotidiens et l’organisation de la société. Elles conditionnent le fonctionnement de l’économie, qui impose son primat à la vie sociale. Les changements qui sont ainsi intervenus ont joué, pour nombre d’entre eux, un rôle libérateur, mais ils ont également contribué à l’avènement du monde plat de la Globalisation. Dans une société dominée par les objets, l’inflation matérielle conduit à un affaiblissement de la culture et de la cohésion sociale. La puissance des armes détruit des pays entiers. Dans ce monde qui semble soumis à l’emprise de la matière, on peut néanmoins déceler les signaux faibles d’un renouveau culturel et spirituel. Aux risques de déshumanisation par un recours irréfléchi aux technologies répond le besoin de vivre de manière plus authentique, en retrouvant ses sources intérieures et en rétablissant un lien empathique avec l’ensemble des êtres vivants. La recherche d’une spiritualité authentique tend à supplanter progressivement l’adhésion conformiste à des croyances. Les découvertes scientifiques récentes contribuent à transformer la vision du monde. A la conception réductionniste d’un Univers mu par le hasard et la nécessité, se substitue la vision d’un Multivers complexe, vivant et créateur, en transformation permanente. Au ressenti d’un monde absurde se substitue l’émerveillement face à un monde harmonieux et « élégant ». La circulation accrue des idées permet aux traditions et cultures du Monde entier d’élargir l’héritage gréco-romain du monde occidental et d’ouvrir de nouveaux horizons. Ces échanges tendent à compenser l’aplatissement du monde par la pseudo-culture mainstream. La configuration que prendra le monde de demain va dépendre de l’impact potentiel futur de ces différents facteurs. L’action collective ne pourra toutefois retrouver un sens qu’à travers l’émergence d’un renouveau culturel, dont on entrevoit les premières lueurs, mais dont on ne peut considérer qu’il est d’ores et déjà acquis.

samedi 21 mai 2016

L'avenir de la démocratie / The future of democracy


The future seems most uncertain in the political area. The great socialist utopias of the XIXth century failed to be implemented in a satisfactory way. They led to totalitarian or dictatorial regimes, instead of the ideal society which was anticipated. But, on the other hand, liberal politicies do not guarantee a democratic society either. To day, the rise of unequalities and the concentration of power in the hands of a minority represent a real threat for democracy. Furthermore, the values claimed by Western countries seem debatable. Thus, the promotion of human rights has been used as an argument for bombing countries in a most disastrous way. The neoliberal ideology which drives globalization wants to replace the political power by governance rules. The economic system is supposed to be self-organized. Private entities can apply any policy, as long as they comply with governance rules. Such a framework is incompatible with  democracy as no real decision power is left to the citizen, who can just comply with what has been decided by the economic actors. When the economic actors are in position to control the State, there is a real threat of a shift towards a totalitarian regime. Therefore, the question is raised about the best way to reinforce democracy.
The utopy of a peaceful world government seems far away and a threat rather than an assurance of public freedom.  The main issue has to be considered presently is how to improve the control of public decisions by the citizens. One way is to introduce a proportion of direct democracy, as it has been made possible through the use of digital technologies.  Other options include the development of a social economy, with organizations operating in the way of cooperatives, at least partly uopn a voluntary basis and the creation of a participatory democracy, involving a large participation of the civil society within the ruling bodies. 
The challenges humanity is facing require a long term approach, which is far from compatible with election timetables. What is needed is some kind of categorical imperative, which can compel citizens and political leaders to place the common interest above individual interests. It is possible only through shared values and a common vision of the future.

L’avenir paraît particulièrement incertain dans le domaine politique. Les grandes utopies socialistes du XIXe siècle ne se sont pas réalisées, du moins sous la forme selon laquelle elles avaient été conçues initialement. Au lieu de la société idéale qui était anticipée, elles ont contribué à la mise en place de la dictature d'un parti unique comme au sein l’ex-URSS ou aujourd’hui en Chine, .
   Dans les pays où la démocratie est ancienne, elle est menacée par la montée des inégalités et la concentration du pouvoir aux mains d’une minorité. Les valeurs dont elle se réclame sont contestées. Ainsi, la défense des droits de l’homme, au lieu de s’appuyer sur de réels principes éthiques, a servi de prétexte à des interventions militaires fort discutables, notamment au Moyen-Orient, avec des conséquences souvent catastrophiques comme en Irak, en Libye ou en Syrie. L’idéologie néolibérale qui oriente la globalisation actuelle prétend abolir ou, tout au moins, réduire au minimum le rôle du pouvoir politique en le remplaçant par une gouvernance guidée par des principes juridiques. Le système économique est supposé fonctionner en auto-organisation. Les entités privées sont alors libres de mener les actions qu’elles souhaitent, à condition de respecter les règles de gouvernance. Une telle conception aboutit en fait à une extinction de la démocratie, puisque aucun choix réel n'est plus proposé au citoyen. Le gouvernement démocratique est remplacé par un système dont le fonctionnement est régi par des mécanismes purement économiques et juridiques. Conçue en dehors de tout principe éthique, la gouvernance devient un instrument au service des plus puissants, ceux qui conçoivent les règles et savent les appliquer à leur profit. De ce fait, il existe, dans ce cas, un danger réel d’évolution vers un système de type totalitaire, dirigé par une minorité prétendant gérer suivant des règles de gouvernance, mais rejetant en fait toute expression démocratique.
   Dès lors, les questions qui se posent quant à l’organisation d’un avenir souhaitable sont multiples. Faut-il toujours espérer l’avènement d’un gouvernement mondial, qui permettrait de mettre fin à toutes les confrontations ? Un tel aboutissement de la globalisation actuelle, est souvent perçu comme le gage d’une paix universelle et le meilleur moyen pour surmonter les principaux défis mondiaux. S’engager dans cette voie pourrait toutefois conduire au résultat contraire, à la tyrannie et à la multiplication des conflits. L’existence de nations diverses en interaction mutuelle contribue à générer des espaces de liberté, alors qu’un gouvernement mondial, doté de tous les pouvoirs, risque d’aboutir rapidement à un système totalitaire. De ce point de vue, l’organisation du monde en entités régionales autonomes et diversifiées semble bien préférable.

vendredi 13 mai 2016

Avons-nous besoin d'utopie? / Do we need any utopia?


Utopias are not much in favour presently. Any utopia is considered as an unrealistic dream. In order to discredit a vision of a radical change, it is often presented as an utopia. The failure of past utopias perpetuates  such a perception. Utopias are also presented as the expression of abstract concepts, which may lead to a totalitarian society, according to Karl Popper. The communist regime in the former USSR is often presented as an exemple of a failed utopia. Still, the negation of utopia as a way to conceive different possible futures, leads to an ideology which rejects any alternative and is therefore incompatible with human liberty. On the contrary, utopia is the expression of human liberty and creativity. The present neoliberalism assigns to the Market all the choices to be made, through a governance processs which is supposed to require no political decision. This logic leads to the disparition of democracy as the citizen is no more involved in making any major choice, whereas all the decisions are made by those who rule the system, In front of the world chaos, the risk of ecological collapse and the rise of geopolitical tensions, it becomes essential to reestablish a link with the Principle of Hope advocated by Ernst Bloch. Utopias, as an expression of human liberty and creativity, excluding ideology and dogmatism, become more necessary to imagine than ever. 

Le concept d'utopie est actuellement peu en vogue. Toute utopie est assimilée à  un rêve irréaliste. Une vision d’avenir qui vise un changement radical, est fréquemment taxée d’utopie lorsque l'on cherche à la discréditer.   L'échec des multiples utopies passées, telles que, par exemple le phalanstère de Charles Fourier, accrédite cette idée. L'utopie est par ailleurs accusée de vouloir faire triompher une idée abstraite.  En prétendant instaurer une société parfaite, toute utopie serait censée conduire à l’avènement d’un régime totalitaire, selon la crainte exprimée par Popper. Le régime communiste, tel qu'il a été mis en oeuvre dans l'ex-URSS est considéré comme l'exemple d'une utopie qui aurait mal tourné.
Toutefois, la négation de l'utopie comme façon de concevoir de multiples futurs possibles aboutit à une idéologie refusant toute alternative concernant l'avenir et de fait contraire à la liberté humaine. Au contraire, l'utopie est l'expression toujours renouvelée de la liberté et de la créativité humaine. La globalisation actuelle s’appuie sur l'idéologie néo-libérale, qui assigne au seul Marché la capacité d’assurer le bonheur de l’humanité, en bannissant « l’idéal d’égalité et de justice dont la matrice utopienne s’est longtemps nourrie ». Une telle conception aboutit en fait à une disparition de la démocratie, puisque plus aucun choix réel n'est proposé au citoyen.