Ce blog rassemble des informations et des réflexions sur l'avenir qui nous attend.

This blog presents informations and views about the future.

mardi 1 mai 2018

Géopolitique des énergies renouvelables/ Renewable energy geopolitics


The geopolitics of renewable energies differs considerably from the geopolitics of hydrocarbons. Oil is easily transportable and the whole problem of energy production is to exploit oil where it is widely available, i.e. mainly in the Middle East. Technology, however, can change the geopolitical situation, making it possible to produce oil in places where it is difficult to access. Thus, thanks to technology, it has been possible to produce oil in the North Sea or source rock hydrocarbons in the United States through hydraulic fracturing, thus considerably altering the previous equilibrium. In any case, however, because oil is inexpensive to transport, the important thing is to be able to dispose of the deposits, irrespective of where the oil is later used. This is the reason why military actions have frequently been taken to control a place of production and sometimes also to ensure freedom of transit. In the case of renewable energy sources, the situation is very different since in general the energy produced must be used in a region close to the production site, because of the high cost of electrical energy transportation, especially if the power transported varies. considerably throughout the year. This situation is generally considered an advantage since it is not necessary to import energy from regions that may pose security of supply problems. However, by reasoning this way, it is overlooked that in most cases the available resources vary considerably from one region to another. Thus, geothermal energy is only really advantageous in regions benefiting, like Iceland, from a high geothermal gradient (in Iceland 100% of electricity is produced from renewable energy, of which 30% by geothermal energy and 70% by hydraulics in 2016). Water resources vary considerably from one country to another. In Europe, for example, Norway (where 96% of the electricity was hydro-electric in 2016) or Switzerland are abundantly supplied with hydraulic power, while the situation is quite different for the countries of the South. The same is true for biomass. Significant wood resources are available in Sweden or Finland (where biomass accounted for 26% of the energy consumed in 2016), but not in Greece and given the fact that wood is solid and its energy density is relatively low, it is also expensive to carry. In the case of solar energy, the situation also varies considerably depending on the latitude (the mean irradiation energy varies between 700 and 2700 kWh / m2). At low latitude, the solar irradiation is much more important and the radiation much more regular during the year, whereas in the northern latitudes the duration of sunshine can vary between 0% in winter and 100% in summer. As a result, the exploitation of solar energy in a country like Norway, where it is almost constantly dark in winter, is obviously problematic, while the countries close to the equator have a strong advantage over the production of solar energy. There remains the case of wind energy. In this case too, the differences are significant between coastal regions and those located further inland (the average available power varies between 50 and 400 W / m2 depending on the point of the globe. Wind energy, because of its extreme intermittency, the quantity of materials it requires and the small margin of progress that can be envisaged, poses other problems that require a more detailed analysis. From this brief reminder, two consequences can be drawn. The first is that there must be significant differences in the availability of renewable energy and it would be illusory to consider all regions as equivalent. Northern countries, such as Norway, Sweden, Canada, have a clear advantage in terms of energy ex-biomass and hydro, the countries of the South, in terms of solar energy. The second is that technology plays a vital role. Mastering a technological sector (or the materials it requires, such as rare earths) provides a considerable geopolitical advantage. This is what China is aiming at in the case of photovoltaics or Germany in the case of wind power.

La géopolitique des énergies renouvelables diffère considérablement de la géopolitique des hydrocarbures.  Le pétrole est facilement transportable et toute la problématique de la production d'énergie revient à exploiter le pétrole là où il est largement disponible, c'est à dire majoritairement au Moyen-Orient. La technologie permet toutefois de modifier la situation géopolitique, en rendant possible la production de pétrole dans des lieux où il est difficilement accessible. C'est ainsi que grâce à la technologie, il a été possible de produire du pétrole en mer du Nord ou des hydrocarbures de roche-mère aux Etats-Unis grâce à la fracturation hydraulique, modifiant ainsi considérablement l'équilibre antérieur. Dans tous les cas néanmoins, du fait que le pétrole est peu coûteux à transporter, ce qui compte est de pouvoir disposer des gisements, quel que soit le lieu d'utilisation ultérieure du pétrole. C'est la raison pour laquelle, des actions militaires ont été fréquemment engagées pour contrôler un lieu de production et parfois aussi pour assurer une liberté de transit.
   Dans le cas des énergies renouvelables, la situation est très différente puisqu'en général l'énergie produite doit être utilisée dans une région rapprochée du lieu de production, en raison du coût élevé du transport d'énergie électrique, surtout si la puissance transportée varie considérablement tout au long de l'année. Cette situation est généralement considérée comme un avantage, étant donné qu'il n'est pas nécessaire d'importer l'énergie de régions qui peuvent poser des problèmes de sécurité d'approvisionnement. Toutefois, en raisonnant ainsi, on omet de prendre en compte le fait que dans la plupart des cas, les ressources disponibles varient considérablement d'une région à une autre. Ainsi, la géothermie n'est vraiment avantageuse que dans des régions bénéficiant, comme l'Islande d'un gradient géothermique élevé (en Islande 100% de l'électricité est produite à partir d'énergie renouvelable dont 30% par géothermie et 70% par hydraulique en 2016). Les ressources hydrauliques varient considérablement d'un  pays à un autre. Ainsi en Europe, la Norvège (où 96% de l'électricité a été d'origine hydraulique en 2016) ou la Suisse en sont abondamment pourvues, alors que ce n'est pas du tout le cas des pays du Sud. Il en est de même pour la biomasse. Des ressources en bois importantes sont disponibles en Suède ou en Finlande (où la biomasse a représenté 26% de l'énergie consommée en 2016), mais pas en Grèce et compte-tenu du fait que le bois est solide et que sa densité énergétique est relativement faible, il est également coûteux à transporter. Dans le cas du solaire, la situation varie également considérablement en fonction de la latitude (entre 700 et 2700 kWh/m2). A faible latitude, l'irradiation solaire est beaucoup plus importante et le rayonnement beaucoup plus régulier durant l'année, alors qu'aux latitudes septentrionales la durée d'ensoleillement peut varier entre 0% en hiver et 100% en été. De ce fait, l'exploitation de l'énergie solaire dans un pays comme la Norvège où il fait nuit presque constamment en hiver, est évidemment problématique, tandis que les pays proches de l'équateur sont fortement avantagés vis à vis de la production d'énergie solaire. Reste le cas de l'énergie éolienne. Dans ce cas également, les différences sont importantes entre les régions côtières et celles qui sont situées plus à l'intérieur des terres (la puissance moyenne disponible étant comprise entre 50 et 400 W/msuivant le point du globe considéré. En outre, l'énergie éolienne, en raison de son intermittence extrême, de la quantité de matériaux qu'elle requiert et de la faible marge de progrès envisageable, pose d'autres problèmes, qui nécessitent une analyse plus détaillée.
   De ce bref rappel, on peut tirer deux conséquences. La première est qu'il faut admettre des différences importantes dans les disponibilités en énergie renouvelable et qu'il serait illusoire de considérer toutes les régions comme équivalentes. Les pays du Nord, tels que Norvège, Suède, Canada, disposent d'un clair avantage en termes d'énergie ex-biomasse et hydraulique, les pays du Sud, en termes d'énergie solaire. La deuxième, c'est que la technologie joue un rôle essentiel. Maîtriser une filière technologique (ou les matériaux qu'elle nécessite, tels que les terres rares) permet d'acquérir un avantage géopolitique  considérable. C'est ce que la Chine vise dans le cas du photovoltaïque ou l'Allemagne dans le cas de l'éolien. 

vendredi 20 avril 2018

L'avenir de la mobilité / The future of mobility


Mobility has been involved in all developments and industrial innovations for more than 150 years, in connection with energy, transport, manufacturing processes and social transformations. The world has experienced a series of industrial revolutions: machinism (1780/1850), Taylorism (1880/1950), automation and liberalism (1950/2000), the digital revolution (2000/2020) and perhaps tomorrow the fusion of physical, digital and biological technologies (2020/2040?) pending the biological revolution and the possible human-machine fusion (2040+?) In this context what will be the mobility of tomorrow? It is expected to become safe, clean, connected, efficient and inclusive. The changes will be guided by the technological evolution of society and by a segmentation between urban mobility, rural and long distance transportation. As mobility needs will explode (x 2.6 by 2050 for passenger transport, x 3 for freight transport), the share of urban transport will increase from 52% in 2010 to 67% in 2050. The use will gradually take precedence over the possession. This will result in a major reorganization of mobility services. The traditional model will however resist for the rural and the long distances, while evolving (plug-in hybrid cars, hydrogen?). Electrical and hydrogen technologies will become competitive. Cars will be electric, autonomous and connected in urban areas. While presently the car manufacturer is at the top of the value chain, tomorrow a whole range of actors will be leading developments in a much more autonomous way than today. The customer equipped with his smartphone will be at the center of the system, while the datas will become the new fuel for this mobility. An autonomous vehicle used in car-sharing will be available 100% of the time (thanks to the induction charge, it will be possible to recharge even while driving). Thus, in urban areas, the autonomous vehicle should be predominantly shared on demand, with a door-to-door mobility service, while in rural areas, car pooling should coexist with the maintenance of vehicles on the move. The car will however remain open to new horizons (drones?). Beyond these technological transformations, a more fundamental question arises. Is the current increase in the number of vehicles sustainable? While the number of vehicles in the world was 220 million in 1970, 660 million in 2000, it has exceeded the current billion and might be close to 2 billion in 2030 and 4 billion in 2050. Energy  and raw materials consumption that implies such an increase seems totally incompatible with the resources of the planet. In addition, the proliferation of advanced technologies (sensors, radars, lidars, digital technologies, lithium batteries, photovoltaic cells, offshore wind turbines, etc.) will also contribute to increasing the demand for scarce materials and rare metals (cobalt, platinum, lithium, neodymium, praseodymium, lanthanum, etc.). Therefore, two scenarios can be foreseen. In the first case, this race towards ever greater mobility and technology would be slowed down. In the second case, an extreme rise in inequalities would become likely: ever more technology and luxury for the happy few and the return to the rickshaw for others.

La mobilité est partie prenante de toutes les évolutions et innovations industrielles depuis plus de 150 ans, en lien avec l’énergie, les transports, les processus de fabrication et l’organisation sociale. Le monde a connu une série de révolutions industrielles : le machinisme (1780/1850), le taylorisme (1880/1950), l’automatisation et le libéralisme (1950/2000), la révolution numérique (2000/2020) et peut-être demain la fusion des technologies physique, numérique et biologique (2020/2040 ?) en attendant la révolution biologique et la possible fusion homme-machine (2040+ ?) Dans ce contexte que sera la mobilité de demain ? Elle devrait devenir sûre, propre, connectée, efficace et inclusive. Les changements seront guidés par l’évolution technologique de la société et par une segmentation entre la mobilité urbaine, le rural et la longue distance. Tandis que les besoins de mobilité explosent (x 2,6 d’ici 2050 pour le transport de passagers, x 3, pour le transport de marchandises), la part du transport urbain va passer de 52 % en 2010 à 67% en 2050. L’usage va progressivement primer sur la possession. Il va en résulter une réorganisation importante des services de mobilité. Le modèle traditionnel résistera toutefois pour le rural et les longues distances, tout en évoluant (hybride rechargeable, hydrogène ?). Les technologies électrique et hydrogène vont devenir compétitives. Les voitures seront électriques, autonomes et connectées en zone urbaine. Alors que le constructeur automobile se trouve, aujourd’hui, au sommet d’une chaîne de valeurs, demain, il se retrouvera au milieu d’un jeu d’acteurs menant des développements de façon beaucoup plus autonome qu’actuellement. Le client équipé de son smartphone sera au centre du système, tandis que les datas vont devenir le nouveau carburant de cette mobilité. Un véhicule autonome utilisé en auto-partage sera disponible 100% du temps (grâce à la charge par induction, il pourra être rechargé même en roulant). Ainsi, dans les zones urbaines, devrait prédominer le véhicule autonome en partage à la demande, avec un service de mobilité porte à porte, tandis que dans les zones rurales, le covoiturage via application et la conduite automatique devraient coexister avec le maintien de véhicules en possession tandis que sur les longues distances conduite automatique et covoiturage devraient s’imposer. La voiture devra toutefois rester un objet de liberté ouvert vers de nouveaux horizons (drones ?). Au delà de ces transformations technologiques, se pose une question plus fondamentale. L'accroissement actuel du nombre de véhicules est-il soutenable? Alors que le nombre de véhicules dans le monde était de 220 millions en 1970, de 660 millions en 2000, il a dépassé le milliard actuellement et pourrait avoisiner 2 milliards en 2030 et 4 milliards en  2050. La consommation d'énergie et de matières premières que suppose un tel accroissement paraît totalement incompatible avec les ressources de la planète. En outre la multiplication de technologies avancées (capteurs, radars, lidars, technologies numériques, batteries lithium, capteurs photovoltaïques, éoliennes en mer, etc.) va également contribuer à augmenter la demande en matériaux peu répandus et métaux rares (cobalt, platine, lithium, néodyme, praséodyme, lanthane, etc.). Dès lors, on peut envisager deux scénarios. Dans un premier cas, on parviendrait à un ralentissement de cette course vers toujours plus de mobilité et de technologie. Dans le deuxième scénario, on observerait une montée extrême des inégalités: toujours plus de technologie et le luxe pour les 1% les plus fortunés et de plus en plus de misère ainsi que le retour au rickshaw pour les autres.

jeudi 12 avril 2018

collapsologie/collapsology


As early as the 1970s, a collapse by depletion of natural resources was considered in the Meadows Report about the limits to growth. More recently, Jared Diamond has linked the collapse of various past civilizations, represented in particular by the ancient Mayans in Mexico, the Vikings living in Greenland or the inhabitants of Easter Island, to a lack of adaptation to a critical change in their environment. Our current globalized society could suffer the same fate, if it fails to overcome the environmental challenges it faces, including the major challenge of global warming. The theme of collapse sparked a whole current of thought, sometimes called collapsology. It is usually the ecological causes of a collapse that are retained and analyzed. However, other causes could also cause a catastrophic end of the Western civilization. One of those who has studied the issue, Dmitry Orlov, distinguishes five stages of collapse: financial, commercial, political, social and cultural. According to this American author born in Russia, a collapse similar to that experienced by the USSR could occur in the United States, due to an inadequate economic policy in the context of the decline of oil resources. A collapse could also occur as a result of a major global conflict, resulting in a sharp worsening of international geopolitical tensions. By taking a step back, we can link a collapse to three main causes, related to an ecological, social or moral crisis,. The ecological crisis leading to a lack of resources is the one studied by Jared Diamond, and this is the most widespread theme investigated today. A crisis of the social organization is the one advanced by Tainter, notably to explain the fall of the Roman Empire. According to Tainter, increasing complexity in a vast empire is becoming more and more difficult to control and is leading to a growing share of unproductive spending. This thesis is in fact unconvincing, because the entire evolution of modern society has relied on a prodigious rise in complexity. It has even been shown that complexity and material prosperity are largely related. Finally, a third type of explanation is linked to a decline, associated with a moral crisis. Such an analysis has been done in the past by authors as prestigious as the historian Arnold Toynbee, the thinker of civilizations Oswald Splengler or the sociologist Pitirim Sorokin. The fear of decline is widely shared in Europe and particularly in France, where this theme was recently taken up by Michel Onfray, who linked the decline of the West to a disintegration of the Christian cement. The inability to face environmental, social or technical challenges is largely linked to a moral crisis. To claim that it is possible to meet a major challenge such as global warming without effort or sacrifice is an illusion or a deception. It will be possible to accept a form of frugality only through an increase of consciousness. Similarly, a major conflict can be avoided only through dialogue, leaving out propaganda. Collapsology involves the risk of being complacent about what would be considered as unavoidable.To announce a future catastrophe is not enough, because it would correspond to the attitude denounced by Jean-Pierre Dupuy, preaching a "enlightened catastrophism", rather than a suicidal blindness. We must do everything to avoid collapse or the nuclear apocalypse and therefore become aware of the catastrophe that lurks, doing everything we can to avoid it.

Dès les années 1970, un effondrement par épuisement des ressources naturelles a été envisagé dans le rapport Meadows qui portait sur les limites de la croissance. Plus récemment, le biologiste américain Jared Diamond a relié l’effondrement de différentes civilisations passées, représentées notamment par les anciens Mayas au Mexique, les Vikings installés au Groenland ou encore les habitants de l’île de Pâques, à un manque d’adaptation vis-à-vis d’un changement critique de leur environnement. La société globalisée actuelle pourrait connaitre le même sort, si elle ne parvient pas à surmonter les défis environnementaux auxquels elle est confrontée et notamment le défi majeur du réchauffement climatique.  Le thème de l’effondrement a suscité tout un courant de pensée, parfois qualifié de collapsologie. Ce sont en général les causes écologiques d’un effondrement qui sont retenues et analysées. Toutefois, d’autres causes pourraient également provoquer une fin catastrophique de la civilisation occidentale. L’un de ceux qui se sont penchés sur la question, Dmitry Orlov, distingue cinq stades d’effondrement : financier, commercial, politique, social et culturel. Selon cet auteur américain né en Russie, un effondrement semblable à celui qu’a connu l’URSS pourrait intervenir aux États-Unis, en raison d’une politique économique inadéquate dans le contexte du déclin des ressources pétrolières. Un effondrement pourrait également survenir à la suite d’un conflit mondial de grande ampleur, entraîné par une aggravation brutale des tensions géopolitiques internationales.

vendredi 6 avril 2018

Le Monde qui vient / The World that Comes


Audiovisual Preface for Alexandre ROJEY's book: "The World that Comes ... Does Humanity Have an Future?" At Editions "Libre & Solidaire"
Due to serious threats to the world: global warming, depletion of resources, rising inequalities, risks of nuclear conflict, humanity will have to change course, to avoid an ecological collapse or a nuclear apocalypse, by controlling the demography, by limiting the consumption of resources and preserving the environment. Unfortunately, all this contradicts the imperatives of the flat world and we are locked in a circle of constraints without any hope of coming out of it. The only way to remedy this situation is to leave the flat world and to change its logic. Such a transformation will be possible only through a renewal of mentalities and lifestyles that would move us from the flat world to a society of meaning and a new vision of the world. Solutions for a better world exist, but the future depends on us.


 " Le Monde qui vient ... L'Humanité a-t-elle un Avenir ? " aux Editions " Libre & Solidaire "
En raison de graves menaces qui pèsent sur le monde: réchauffement climatique, épuisement des ressources, montée des inégalités, risques de conflit nucléaire,  l’humanité devra changer de cap, pour éviter un effondrement écologique ou une apocalypse nucléaire, en maîtrisant la démographie, en limitant la consommation de ressources et en préservant l’environnement. Malheureusement, tout ceci entre en contradiction avec les impératifs du monde plat et on se trouve enfermé dans un cercle de contraintes sans espoir d’en sortir. Le seul moyen de remédier à cette situation est de sortir du monde plat, pour aller vers d’autres modes de fonctionnement. Une telle transformation n’est possible qu’à travers un renouveau des mentalités et des modes de vie  qui permettrait d’aller du monde plat à une société du sens, en adoptant une nouvelle vision du monde. 

Les solutions pour un monde meilleur existent, mais l’avenir dépend de nous !

vendredi 30 mars 2018

Le véhicule à hydrogène: rêve ou réalité?/ The hydrogen vehicle: dream or reality?


Generations of researchers and engineers have been dreaming about the hydrogen vehicle. A fuel whose combustion emits only water seems ideal for vehicles traveling in polluted metropolitan cities. Producing this fuel from renewable energies would provide a clean and sustainable solution. Unfortunately the difficulties are numerous. Hydrogen is currently produced from methane, emitting 10 kg of CO2 per kg of hydrogen produced. Electrolytic production is much more expensive, especially if the electrolyser is used intermittently. Hydrogen transportation and storage poses difficult problems, both in terms of cost and safety. Finally, progress in the field of fuel cells is slower than originally planned. Two experiments currently carried out in France show, however, that hydrogen vehicles can find their place for well-chosen applications. The company Pragma Industries has realized a bicycle running on a fuel cell and hydrogen as fuel. It plans to develop many other applications in the coming years (tricycles, drones, scooters, portable health devices). The current system (Alpha) includes a PEM fuel cell and hydrogen storage in a tank at 200 bar embedded in the bicycle. All these devices are compactly integrated. The range may exceed 100 km and the time for recharging is of the order of 1 min. Various projects including a charging station are underway: Vedecom Versailles (10 bikes and a charging station), Saint Lô Cherbourg (20 bikes and 2 charging stations), Savoie (2 charging stations 20 km one of the other). The Hype program, developed by the STEP start-up, consists in implementing a fleet of hydrogen taxis. This program is justified by the need for "zero emission" vehicles in cities for reasons of public health. Electric vehicles have limitations (range, charging time, battery materials) that can be lifted with hydrogen vehicles. In addition, the city of Paris lends itself well to such experimentation: global showcase, adapted market, political support from the mayor, Anne Hidalgo. At the beginning of 2018, 75 vehicles (62 IX 35 and 13 Mirai) are in place. The aim is to demonstrate the validity of this option by deploying 600 vehicles by the end of 2020, in order to implement a more fully commercial Phase 2. The stakes are high (17,000 taxis and 20-30,000 VTCs). The Olympic Games of 2024 represent an opportunity to deploy a new non-polluting solution. It is now a question of broadening the partnership through HysetCo, a structure which will allow to acquire new financing, to develop the current experiment and to prepare Phase 2. These two experiments show that hydrogen vehicles can make part of the reality of tomorrow. Other targeted applications may be considered: road transport of goods or public transport. The issue of hydrogen service stations is critical, but can be solved quite easily for vehicles traveling in defined urban areas, or between specific locations.

Le véhicule à hydrogène a fait rêver des générations de chercheurs et d'ingénieurs. Un carburant dont la combustion ne rejette que de l'eau paraît idéal pour alimenter des véhicules circulant dans les métropoles polluées d'aujourd'hui. Produire ce carburant à partir d'énergies renouvelables permettrait de disposer d'une solution propre et durable. Malheureusement les difficultés sont nombreuses. L'hydrogène est actuellement produit à partir de méthane, en émettant 10 kg de CO2 par kg d'hydrogène produit. Le produire par électrolyse coûte beaucoup plus cher, surtout si l'électrolyseur est utilisé de manière intermittente. Le transport et le stockage de l'hydrogène posent des problèmes difficiles, à la fois en termes de coûts et de sécurité. Enfin, les progrès dans de domaine des piles à combustibles sont moins rapides que ce qui était initialement prévus. Deux expérimentations menées actuellement en France montrent toutefois que les véhicules à hydrogène peuvent trouver leur place sur des créneaux bien choisis. La société Pragma Industries  a réalisé un vélo fonctionnant avec une pile à combustible et de l’hydrogène comme carburant. Elle prévoit de développer de nombreuses autres applications dans les années à venir (tricycles, drones, scooters, appareils de santé portables, applications militaires). Le système actuel (Alpha) comporte une pile à combustible PEM et un stockage d’hydrogène sous pression à 200 bar embarqué dans le cadre du vélo. Tous ces dispositifs sont intégrés de manière compacte. L’autonomie peut dépasser 100 km et le temps de recharge est de l’ordre de 1 mn. Différents projets intégrant une borne de recharge sont en cours: Vedecom Versailles (10 vélos et une station de recharge), Saint Lô Cherbourg (20 vélos et 2 stations de recharge), Savoie (2 stations de recharge à 20 km l’une de l’autre). Le programme Hype, développé par la société STEP, consiste à mettre en œuvre une flotte de taxis à hydrogène. Ce programme est justifié par la nécessité de disposer de véhicules « zéro émission » dans les villes pour des raisons de santé publique. Les véhicules électriques présentent des limitations (autonomie, temps de recharge, matériaux pour batteries), qui peuvent être levées avec les véhicules à hydrogène. En outre, la ville de Paris se prête bien à une telle expérimentation : vitrine mondiale, marché adapté, soutien politique (Anne Hidalgo). Début 2018, 75 véhicules (62 IX 35 et 13 Mirai) sont en place. Le but poursuivi est de démontrer le bien-fondé de cette option, en déployant 600 véhicules d’ici fin 2020. Il s’agirait ensuite, en Phase 2, de passer à une offre véritablement commerciale. Les enjeux sont importants (17 000 taxis et 20-30 000 VTCs). Les Jeux Olympiques de 2024 représentent une opportunité pour déployer une nouvelle solution non polluante. Il s’agit à présent d’élargir le partenariat à travers HysetCo, structure qui doit permettre d’acquérir de nouveaux financements, de développer l’expérience actuelle et de préparer la Phase 2. Ces deux expérimentations montrent que les véhicules à hydrogène peuvent faire partie de la réalité de demain. D'autres applications ciblées peuvent être envisagées: transport routier de marchandises ou transport collectif. La question des stations service de distribution d'hydrogène est critique, mais peut-être résolue assez facilement pour des véhicules circulant dans des zones délimitées, en milieu urbain, ou entre des lieux déterminés.

mercredi 21 mars 2018

La conscience: tout ou rien? /Consciousness: everything or nothing?


Throughout his life, the human being is subjected to scary questions about the meaning of his life. Does this short existence have any meaning? Is it doomed to sink into nothingness? Failure to have clear answers to these questions greatly aggravates the discomfort and anxiety that is prevalent in our time. Among these questions, the question of consciousness appears as central. In the world of objects around us, more pregnant than ever, what constitutes our subjectivity? How to interpret the irreducible distance that separates our inner being from the outside world? What is the source of our unity, of our personnality? What relationship can be established between our inner self and that of others? The question of consciousness has several aspects. Those directly addressed by present-day science concern the processes through which the perception of all information reaching the consciousness takes place. Knowledge about these processes has progressed considerably thanks to neuroscience. An entirely different question continues to arise. It is that of the nature of consciousness. It is also an unresolved issue. For one of the most thoughtful on this topic, the Australian scholar David Chalmers, it is the difficult question between all. Yet this question conditions the understanding of our own nature. To wonder about it is essential to choose a life line. While there are many books on the questions of consciousness and the mind, they do not give the impression of elucidating the question. After claiming that consciousness represents the "difficult question", David Chalmers believes he has an explanation: consciousness would be reduced to information. So a thermostat would be provided with a beginning of consciousness! Artificial intelligence would be a fortiori associated to a form of consciousness. The philosopher Markus Gabriel adopts a more reasonable point of view, refusing such a reductionism. He criticizes the excessive aims of neuroscience when they claim to explain consciousness. However, he managed the feat of writing an entire book about consciousness, without really discussing its nature nor giving a beginning of explanation to its presence. The words of conscience, of mind, of subjectivity are charged with so many connotations, that to employ them becomes almost impossible. For anyone who accepts a moment to free himself from any preconceived idea, the inner consciousness appears as an evidence, even before any external reality. It is even for each of us the first revelation, the one that allows us to access the miracle of life and the totality of our experience. Yet, as this notion disturbs all those who have adopted a purely materialistic and reductionist point of view, many people simply deny it existence. Consciousness is for them at worst only an illusion, at best a mere fantasy. For all those who share such a view, the intelligent machine represents the new horizon. According to the conceptions adopted, consciousness can thus pass from the Whole, by confounding itself with the Universe, with Nothing, in a narrow materialistic conception, which simply denies its existence.

Tout au long de sa vie, l’être humain est soumis à des questions angoissantes sur le sens de sa vie sur Terre. Cette courte existence a-t-elle une signification ? Est-elle vouée à sombrer dans le néant ? Le fait de ne pas disposer de réponses claires à ces questions aggrave considérablement le mal-être et le sentiment d’angoisse qui sont répandus à notre époque. Parmi ces interrogations, la question de la conscience apparaît comme centrale. Dans le monde d’objets qui nous entoure, plus prégnant que jamais, qu’est ce qui constitue notre subjectivité ? Comment interpréter la distance irréductible qui sépare notre être intérieur du monde extérieur ? Quelle est la source de notre unité, de notre Je? Quelle relation peut-elle être établie entre notre intériorité et celle d’autrui, entre Je et Tu ? La question de la conscience comporte plusieurs aspects. Ceux qui sont directement abordés par la science actuelle concernent les processus à travers lesquels s’effectue la perception de toutes les informations qui parviennent à la conscience. Les connaissances concernant ces processus ont considérablement progressé grâce aux neurosciences.
   Une toute autre question continue à se poser. C’est celle de la nature de la conscience. C’est aussi une question non résolue. Pour l’un de ceux qui ont le plus réfléchi sur ce thème, l’universitaire australien David Chalmers, c’est la question difficile entre toutes. Pourtant cette question conditionne la compréhension de notre propre nature. S’interroger à ce sujet est indispensable pour choisir une ligne de vie. Certes, il existe de nombreux ouvrages sur les questions de la conscience et de l’esprit, mais ils ne donnent guère l'impression d'élucider la question. Après avoir affirmé que la conscience représente la "question difficile", David Chalmers croit disposer d'une explication: la conscience se ramènerait à l'information. Ainsi un thermostat serait pourvu d'un début de conscience! L'intelligence artificielle serait a fortiori accompagnée d'une forme de conscience. Le philosophe Markus Gabriel adopte un point de vue plus raisonnable, en refusant un tel réductionnisme. Il critique les visées excessives des neurosciences lorsqu'elles prétendent expliquer la conscience. Toutefois, il réussit l'exploit de rédiger tout un ouvrage sur la conscience, sans réellement discuter de sa nature ni donner un début d'explication à sa présence. Les mots de conscience, d’esprit, de subjectivité sont chargés de tant de connotations, que les employer devient presque impossible. Pour quiconque accepte un instant de se libérer de toute idée préconçue, la conscience intérieure apparaît comme une évidence, avant même toute réalité extérieure. Elle est même pour chacun d’entre nous la révélation première, celle qui nous permet d’accéder au miracle de la vie et à la totalité de notre expérience. Pourtant, comme cette notion dérange tous ceux qui ont adopté un point de vue purement matérialiste et réductionniste, nombreux sont ceux qui la nient purement et simplement l’existence. La conscience n’est pour eux au pire qu’une illusion, au mieux un simple fantasme. Pour tous ceux-là, la machine intelligente représente le nouvel horizon. Selon les conceptions adoptées, la conscience peut ainsi passer du Tout, en se confondant avec l’Univers, au Rien, dans une conception matérialiste étroite, qui en nie simplement l’existence.

lundi 12 mars 2018

L'institution imaginaire de la société / The Imaginary Institution of Society


The organization of society depends on a social imaginary, which is formed from all convictions, beliefs and values . This imaginary is distinguished from a simple representation because it refers to a meaning, a set of values. Every society is thus "a system imaginary instituted to cope with new conditions". Each vision of the world, imposing its conceptions, sometimes unconsciously, determines the practices followed by economic and political leaders. Customs that seem unacceptable today have been considered normal at other times. Human sacrifices have been practiced for long periods by advanced civilizations, notably by the Aztecs and the Mayas. Slavery or circus games have been accepted without much reserve in the past. Thus such an eminent thinker as Aristotle approved the practice of slavery, believing that it could not be dispensed with. Even today, practices that are considered lawful are not the same from one country to another. Although abolished if not by right in most countries, the death penalty remains enforced in China, Indonesia or the United States. It is part of the blasphemy punishments in Saudi Arabia, as well as in other countries, such as Pakistan and Kuwait. It is a certain vision of the world that guides artists and architects. Each city reflects the conceptions of its inhabitants. The Roman city of antiquity, with its rectilinear paths intersecting at right angles, reflected the taste for the order of the Roman citizen and the power of public authority. The skyscrapers of New York display a desire for power, while the architecture of a city like Amsterdam meets a more intimate conception of happiness. The collective vision of a group, an ethnic group or a nation is transmitted through different forms of cultural expression: architecture, visual arts, music and literature. Associated within a coherent cultural model, they constitute the testimony of a civilization. If it is attractive enough, such a cultural model can be adopted by another nation, without necessarily being imposed by force. Thus, while preserving its individuality, Japan has adopted the culture of China. Southeast Asia has been strongly influenced by Brahmanic culture, as evidenced by the temples of Angkor. While having conquered Greece, the Roman Empire was seduced by its culture. In the aftermath of the Second World War, the social-democratic model that was then dominant in Europe set itself the goal of ensuring social protection and a form of prosperity for all, while accepting the market economy. This model, based on representative democracy, the welfare state and industrial capitalism, was applied in France during the period of the Thirty Glorious, marked by exceptionally high economic growth. It could be considered as a culmination of modernity, the modern utopia of happiness for all. Such a model is no longer compatible with the postmodern utopia of the current neoliberal system, based on the market, finance, self-organization of social structures and moral relativism. Each individual is supposed to be self-sufficient, in a world that dispenses with any foundation other than calculating utility. The multinationals deploy acentric and connected systems, whose rhizomatic structure, already announced by Gilles Deleuze and Félix Guattari, invades the whole space. The universal principles of liberty, democracy and human rights are, of course, frequently invoked in an almost ritualistic way, but above all they serve as a formal justification for the neoliberal order. The economic procedures applied in the context of the Market replace the political decision. The role of the state is limited to imposing, by force if necessary, the rules set by the economic actors.

L’organisation de la société dépend d’un imaginaire social, qui se forme à partir de l’ensemble des convictions, croyances et valeurs. Cet imaginaire se distingue d’une simple représentation, car il renvoie à une signification, à un ensemble de valeurs. Toute société est ainsi « un système imaginairement institué pour faire face à des conditions nouvelles ». Chaque vision du monde, en imposant ses conceptions, de manière parfois inconsciente, détermine les pratiques suivies par les responsables économiques et politiques. Des coutumes qui paraissent inacceptables aujourd’hui ont été jugées normales à d’autres époques. Les sacrifices humains ont été pratiqués sur de longues périodes par des civilisations avancées, notamment par les Aztèques et les Mayas. L’esclavage ou les jeux du cirque ont été acceptés sans grande réserve dans le passé. Ainsi un penseur aussi éminent qu’Aristote approuvait la pratique de l’esclavage, estimant qu’on ne pouvait s’en dispenser. Même de nos jours, les pratiques jugées licites ne sont pas les mêmes d’un pays à un autre. Bien qu’abolie de fait sinon de droit dans la plupart des pays, la peine de mort reste appliquée en Chine, en Indonésie ou aux États-Unis. Elle fait partie des châtiments pour blasphème en Arabie Saoudite, ainsi que dans d’autres pays, tels que le Pakistan et le Koweït. C’est une certaine vision du monde qui guide les artistes et les architectes. Chaque ville reflète les conceptions de ses habitants. La ville romaine de l’Antiquité, avec ses voies rectilignes se coupant à angles droits, traduisait le goût de l’ordre du citoyen romain et la puissance de l’autorité publique. Les gratte-ciel de New-York affichent une volonté de pouvoir, tandis que l’architecture d’une ville comme Amsterdam répond à une conception plus intime du bonheur. La vision collective d’un groupe, d’une ethnie ou d’une nation se transmet à travers les différentes formes d’expression culturelle : architecture, arts plastiques, musique et littérature. Associées à l’intérieur d’un modèle culturel cohérent, elles constituent le témoignage d’une civilisation. S’il est suffisamment séduisant, un tel modèle culturel peut être adopté par une autre nation, sans être nécessairement imposé par la force. Ainsi, tout en préservant son individualité, le Japon a adopté la culture de la Chine. L’Asie du Sud-Est a été fortement influencée par la culture brahmanique, comme en témoignent les temples d’Angkor. Tout en ayant vaincu la Grèce, l’Empire romain s’est laissé séduire par sa culture.
 Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le modèle social-démocrate qui était alors dominant en Europe, se donnait comme but d’assurer à tous la protection sociale et une forme de prospérité, tout en acceptant l’économie de marché. Ce modèle, fondé sur la démocratie représentative, l’État-providence et le capitalisme industriel, a été appliqué en France durant la période des Trente Glorieuses, marquée par une croissance économique exceptionnellement élevée. Il a pu être considéré comme une forme d’aboutissement de la modernité, l’utopie moderne d’un bonheur pour tous. Un tel modèle n’est plus compatible avec l’utopie postmoderne du système néolibéral actuel, fondé sur le Marché, la finance, l’auto-organisation des structures sociales et le relativisme moral. Chaque individu est censé se suffire à lui-même, dans un monde qui se dispense de tout fondement autre que le calcul d’utilité. Les multinationales déploient des systèmes acentrés et connectés, dont la structure rhizomatique, déjà annoncée par Gilles Deleuze et Félix Guattari, envahit tout l’espace. Les principes universels de liberté, de démocratie et de droits de l’homme sont, certes, fréquemment invoqués de façon quasiment rituelle, mais ils servent, avant tout, de justification formelle à l’ordre néolibéral. Les procédures économiques appliquées dans le cadre du Marché se substituent à la décision politique. Le rôle de l’État se limite à imposer, par la force s’il le faut, les règles fixées par les acteurs économiques.