Ce blog rassemble des informations et des réflexions sur l'avenir qui nous attend.

This blog presents informations and views about the future.

dimanche 13 décembre 2015

De l'homme inutile à la société du sens / From the useless man to the meaningful society

The French economist Pierre Noël Giraud has recently published a book entitled "The Useless Man" (in French). According to his assessment, globalization has lead to an increase of inequalities and to a progressive vanishing of the middle class within developed countries. Therefore, the population tends to be split between a minority of "nomads" and a "sedentary" majority. The "nomad" population is well-educated, travels easily and can easily find a job anywhere. This fraction of the population which gets high incomes and constitutes the ruling class, is becoming more and more concentrated, as less and less people get richer and richer. The majority of "sedentary" people do not move easily and find increasingly difficult to get a job. They get disqualified, insecure and pauperized. These socially excluded men and women are considered as "useless" according to the criteria of the Market.  This situation is clearly unacceptable. It becomes necessary for any country or region to find a way for becoming more autonomous. Social needs are huge in many areas such as environment protection, education, assistance to people who are ill, old or vulnerable. Cultural activities need to be supported as they provide a soul to the society. Whereas nomad activities can find easily a way for escaping to fiscal rules, it is necessary to draw more resources for developing activities which can provide a meaningful life to most citizens.  It would become then possible to shift from a society of "useless" people to a truly meaningful society.

L'économiste Pierre-Noël Giraud a publié récemment l'ouvrage intitulé "L'homme inutile". Suivant son analyse, la montée des inégalités suscitée par la globalisation lamine les classes moyennes, qui tendent progressivement à disparaître dans les pays développés. Dans ces conditions, la population tend à se répartir en deux catégories: une minorité de "nomades" et une majorité de "sédentaires". Les nomades sont instruits, disposent d'un niveau de formation et d'expertise élevé, voyage facilement, parlent anglais et peuvent monnayer leurs compétences partout dans le monde. De ce fait, ils disposent de revenus élevés.  Au contraire les "sédentaires" de par leur formation et leur activité ne peuvent pas se déplacer facilement pour aller exercer leur activité. C'est sur eux que pèsent le chômage et les emplois précaires. Compte-tenu des effets de la compétition internationale et de la mécanisation croissante du travail, un nombre croissant d'entre eux ne trouve plus d'emploi. Cette catégorie de la population comprend ainsi une proportion croissante d'hommes et de femmes "inutiles" selon les critères de l'ordre marchand. Ces personnes se trouvent progressivement disqualifiées et paupérisées. Elles ont le sentiment de ne plus pouvoir agir sur leur destin. En outre les intérêts de la minorité "nomade" se trouvent de plus en plus déconnectés de ceux de la majorité des sédentaires, entraînant une fracture de plus en plus marquée entre les dirigeants nomades et le peuple sédentaire.  Cette situation est éminemment dangereuse;
Il devient essentiel de retrouver une autonomie nationale et régionale suffisante pour se prémunir d'un tel piège. Les besoins en activités d'intérêt général sont considérables dans des domaines tels que la préservation de l'environnement, l'éducation, les soins aux malades, l'aide aux gens âgés et aux personnes vulnérables. Les activités culturelles peuvent également redonner une âme à la société. Alors que les activités nomades parviennent souvent à échapper à la fiscalité, il faut parvenir à drainer une part croissante de ressources pour alimenter les activités qui peuvent redonner un sens à la vie des sédentaires, c'est à dire de la majorité des habitants. Il sera ainsi possible de passer d'une société d'hommes inutiles à une société du sens. 

jeudi 12 novembre 2015

Du collectivisme à la coopération / From collectivism to cooperation


Will it be possible to organize a truly cooperative society, some kind of community? No socialist community imagined in the past has ever succeeded. The communities planned by Robert Owen or Charles Fourier have been partially experimented, but are considered now as utopias. All the collective social systems such as those experimented within the former USSR have failed. Their failure has been used as an argument for imposing another utopia, a fully liberal system. Still, most citizens are not driven only by individual profit and wish to share strong social links. Furthermore cooperation appears as essential for building a succcessful society. Different organizations presently tested might anticipate the organization of a future community. One possibility already tested in some organizations is to establish a whole bundle of communities (or holons) linked together. Such a holarchy avoids  the need of a centralized managementIt is also possible to develop a cooperation between different firms, sharing common means. A cooperative entrepreneurship can be very flexible and help small firms to operate within a global environment. Another way to organize a community is through the sharing of equipments, tools or experience. Sharing a car, a house or a tool can help to make a much better use of it. Digital technologies are now widely used for organizing this sharing in an efficient way as shown by many existing systems for car sharing. Sharing experience and knowledge is also attracting an increasing number of participants, through different communities of practice such as those which belong to the DIY movement. All these expériences may anticipate the organization of a future community, driven by collective interest rather than individual profit.

Sera-t-il possible d'organiser la société en véritable Communauté dans l'avenir? Alors que le système capitaliste s’est montré remarquablement résilient, tous les projets qui visaient à instaurer une communauté de vie ainsi qu’à partager l’ensemble des biens et des moyens de production ont échoué. La plupart des communes inspirées par des principes socialistes ont été des échecs ou sont restées au stade d’utopies. Conçues comme des cités idéales, elles avaient pourtant fait l’objet de plans précis, élaborés par des philanthropes tels que Robert Owen ou comme Charles Fourier, qui souhaitaient assurer le bonheur du genre humain. Les expériences de communes qui avaient été tentées en ex-URSS ont été rapidement abandonnées au profit de la collectivisation étatique. Les kolkhozes et sovkhozes ont été imposés à la paysannerie de façon souvent violente et les propriétaires terriens, qualifiés de « koulaks », ont été exterminés. La tentative d’imposer un modèle de société par la contrainte a été un échec. La création d’appartements communautaires pourvus de cuisines partagées entre plusieurs familles a été mal vécue par les habitants, qui souffraient de la promiscuité et du manque de liberté dans leurs choix d’aménagement ou de décoration. La mise en commun des outils de production s’est également avérée peu efficace. L’expérience communiste a conduit non seulement à la débâcle économique de l’ex-URSS, mais aussi à un rejet massif d’un tel système par les populations auxquelles il avait été imposé. Les conséquences de ce refus sont appelées à persister encore longtemps. Un retour au collectivisme paraît donc exclu, mais une économie collaborative, qui mise sur la coopération plutôt que sur la compétition paraît indispensable pour éviter les dérives actuelles, qui risquent de conduire à des conflits violents et à la destruction de la planète. Différentes initiatives actuelles préfigurent une société future du partage.
   Au mode de fonctionnement centralisé et pyramidal se substitue une organisation décentralisée, opérant en « cercles » capables de s’auto-organiser à leur niveau, tout en maintenant des liaisons souples avec l’ensemble de la structure. Ce modèle, qui dérive du concept d’holarchie introduit par Arthur Koestler, consiste à mettre en œuvre une organisation par holons (les cercles), qui peuvent s’organiser de manière autonome, par niveaux de complexité croissante. Dans les différents cercles, chaque personne participe aux décisions. Celles-ci sont prises toutefois en tenant compte des objectifs fixés pour l’ensemble de l’organisation. Un mode de fonctionnement de type holarchique a déjà connu un début de réalisation dans un certain nombre d’entreprises. Une organisation similaire, par niveaux emboités, est également mise en œuvre pour gérer les services de protection sociale, d’éducation et de préservation de l’environnement. Elle permet une décentralisation des décisions ainsi qu’une participation des usagers eux-mêmes au bon fonctionnement de l’organisation.

vendredi 16 octobre 2015

Le prix du carbone comme solution au réchauffement climatique / Carbon pricing as a solution to global warming


On October 15th, a Conference was held in Paris about the "Economic stakes of the 2015 Paris Climate Conference". A large group of economists has signed a call for an ambitious and credible climate agreement in Paris, based on three principles expressed in a very simple and concise manner:
(1) All nations should face ultimately the same CO2 price (2) Carbon pricing must incentivize universal participation and (3) "Free-rider" behavior has to be hindered. The way carbon pricing is implemented can vary: it can be based either upon a carbon tax or upon a cap-and-trade mechanism. It is considered that such a choice is not essential and can be left to the different governments. Carbon pricing remains compatible with transfer mechanisms in order to comply with equity principles and to achieve a universal participation. Presently, we are very far from such a universal acceptance of carbon pricing. In the view of the group of economists led by Jean Tirole, with the authority resulting from his Nobel Memorial Prize in Economics, it represents the only way to curb CO2 emissions in an efficient way. It would make possible to avoid the situation encountered in Europe where the big effort in favour of renewable energy sources has been accompanied by a wider use of coal replacing natural gas resulting in an increase of CO2 emissions. Carbon pricing is not part of the COP 21 agenda. Still, this idea is encountering a wider acceptance and might help to implement later on a final agreement, providing a real solution to the the global warming challenge. 

Le 14 octobre 2015 s'est tenu à l'Université Paris-Dauphine  un important Colloque sur " Les enjeux économiques de la Conférence de Paris sur le Climat". Il a réuni les économistes français se penchant sur la question du Climat, avec la participation d'un certain nombre de leurs collègues étrangers. Une équipe internationale d'économistes a signé un appel en vue de la COP 21, qui se ramène à trois principes qui sont exprimés de manière extrêmement simple et concise: (1) Toutes les nations devraient à terme se mettre d'accord sur un prix unique du CO2 (2) La façon de mettre en place un tel système de prise en compte du carbone émis doit permettre de l'étendre partout (3) Si une nation n'intègre pas une telle contrainte, elle doit être pénalisée dans le cadre des échanges commerciaux.
Une telle position n'est pas incompatible avec des mécanismes de transfert financiers entre nations, suivant des critères à définir. Le principe d'une tarification peut être appliqué en suivant différents mécanismes, dont les deux principaux sont la taxe carbone et le mécanisme de plafonnement et d'échange conduisant au marché des permis d'émissions. La façon exacte d'appliquer la tarification est jugée secondaire.

mardi 6 octobre 2015

Bioéconomie / The plenitude economy


For a long time, economy has tried to evolve as a pure science, independantly of   environmental or human factors, describing in an abstract way the relationship between suppy and demand. It has tried also to explain all human behaviour in economic terms. Thus, for the economist  Gary Stanley Becker,  parents invest in the education of their children, in order to get a protection when they become old, according to an economic assessment. At the opposite of such a conception, economy can be integrated within the much wider realm of  life sciences. Humanity cannot survive without its environment and the biosphere to which it belongs. Therefore, economy has to take into account the needs of the web of life and become a plenitude economy, a bioeconomy (bioéconomie in French, according to the economist  René Passet). An economy system can remain viable, only if it operates in symbiosis with the environment. It requires regulation modes able to limit the consumption of resources and the production of waste. Products and objects have to be designed in a way which helps to recycle them and to minimize their impact upon the environment during their whole life cycle from cradle to grave. Preserving nature, even in urban areas. besides preserving the environment, helps to improve  the quality of life, reducing the stress, bringing calm and serenity to the inhabitants.  Thus, regulatory and economic models taking into account bioeconomic factors help to organize a more harmonious way of life not only environmentally friendly, but also more peaceful and just  

L’économie a cherché pendant longtemps à se libérer des sciences humaines, en décrivant de manière de plus en plus abstraite les relations entre offre et demande. Elle a voulu aussi expliquer les comportements humains par des raisons purement économiques, de manière parfois caricaturale. Ainsi selon l’économiste Gary Stanley Becker, c’est pour se prémunir dans leur vieillesse que les parents investissent dans l’éducation de leurs enfants, en suivant un calcul économique. A l’opposé d’une telle vision, l’économie peut être intégrée dans le champ beaucoup plus vaste des sciences du vivant, dont elle ne serait qu’un sous-ensemble. L’humanité ne peut survivre en dehors de son environnement et de la biosphère dont elle fait partie. Pour ne pas s’engager dans des voies impraticables, l’économie doit tenir compte du milieu vivant et se transformer en une bio-économie, qui a été notamment préconisée par l’économiste René Passet. Le vivant, plutôt l’argent, devrait être considéré comme la valeur centrale en économie. Dans ses travaux concernant les interactions entre l’économie et le vivant, René Passet a cherché à dégager les conditions à respecter pour créer une économie durable.  Une telle bioéconomie ne se limite pas à exploiter au mieux les ressources naturelles et en particulier  la biomasse pour produire de l'énergie et des matières premières ( ce qui est le sens habituel de bioeconomy, d'où le choix de plenitude economy pour traduire bioéconomie en anglais). Elle vise à réunir toutes les conditions requises pour la préservation de la vie, qui remplace la richesse comme priorité de l'économie.

dimanche 13 septembre 2015

La génération des tribus / The new generation of tribes


The consumerist individualism is more and more challenged. The will to forge further human links drives the expansion of social networks and the creation of multiple associations and collective organizations. Communities of practice share a common passion, music, software or recent disruptive technologies such as 3D printing. Some communities share their belongings and live together. New generations are less interested by owning an equipment than by just using it. Numerical platforms help to develop borrowing or bartering practices. Small compact living districts are preferred to dispersed individual housing or large anonymous cities. The sociologist Michel Maffesoli describes contemporary tribes which meet around gathering totems. The members of a tribe are linked by emotional attachments. They share a similar musical taste and the same dress codes. They like to meet within large festivals or big fairs for sharing experiences. Thousands of participants meet each year in the Black Rock Desert of Arizona, for a big festival during which a large wooden effigy  is burned. Maker Fares are organized throughout the world, where makers come to show their créations and share their learnings. Other groups try to promote alternative policies. In France communities were created for protesting against the Notre-Dame-des-Landes airport project or the dam which was planned at Sievens. It was an opportunity for young people to share a common life and to test different ways of sharing common goods, such as tools or bikes. These large gatherings are an ideal laboratory for the future, where new ideas and lifestyles can be tested. They demonstrate a will to find common passions and closer social links.

L’individualisme consumériste est de plus en plus contesté. La volonté de retisser des liens humains se manifeste notamment à travers l’intérêt porté aux réseaux sociaux ainsi qu’à de multiples associations ou organisations collectives. Des communautés de pratique se réunissent autour d’une passion commune, que ce soit la musique, l’informatique (hackers) ou la mise en œuvre des technologies les plus récentes de l’impression 3D (makers). D’autres expériences vont jusqu’à la création de communautés de vie, avec partage de biens en commun.
   Les nouvelles générations sont moins intéressées par la possession d’un objet que par son usage. Des pratiques de prêt et de troc se développent, favorisées par la mise en place de plateformes numériques de partage ou d’échange. On peut ainsi échanger des logements pour une période de vacances, partager l’usage d’une voiture ou d’un outil de bricolage. Plutôt que d’être jetés après une période d’utilisation relativement courte, les objets trouvent constamment de nouveaux usages.
   Aux relations anonymes des grandes villes se substituent progressivement des liens plus directs entre voisins, au sein de structures urbaines ou rurales plus petites. Pour des raisons différentes, les grands ensembles ainsi que l’habitat individuel dispersé maintiennent l’éloignement social entre des voisins qui se croisent sans se connaître. Ces deux formes de structures urbaines, dominantes dans le passé, tendent à faire place à des ensembles d’habitations relativement compacts, qui restent à échelle humaine et favorisent l’interaction sociale, en recréant l’ambiance d’un village, dans lequel tous les habitants se connaissent et sont prêts à s’entraider.
   Le sociologue Michel Maffesoli a décrit les « tribus » contemporaines, formées par des groupes de personnes, qui se réunissent autour de totems de rassemblement. Les membres d’une tribu partagent des émotions et sont liés par des liens affectifs, qui s’expriment à travers diverses manifestations et actions collectives. Ils ont les mêmes goûts musicaux, partagent les mêmes codes vestimentaires et apprécient les mêmes modes de vie. Ils se retrouvent dans le cadre de grands rassemblements, à l’occasion de foires ou de grands événements festifs pour échanger des expériences communes.

samedi 15 août 2015

Corrida et dauphins / Corrida and dolphins


Some time ago, a distinguished French philosopher has highlighted the corrida as a most sublime  and ethical event. The bull only wants to fight and does not suffer (there are people who "know" it) . The corrida is moral, because "moral universality does not extend beyond the human species". Such an argument has been othen used establishing a radical barrier between "we", who are supremely intelligent and "others". The main argument is the beauty of "tradition", whatever its purpose. In Faroe Island, although a part of the most civilized kingdom of Denmark, a tradition which goes back to the XVIth century, consists in the slaughter (or grind) of the greatest possible numbers of dolphins and whales, with the help, nowadays, of powerboats. Only a small fraction of the meat, which is contaminated with heavy metals, is eaten.  This practice, although contrary to the European regulations, is supported by the Danish government in the name of "tradition". Five animal rights activists from the "Sea Shepherd" association were arrested recently, because they tried to prevent the slaughter. The fascination for slaughter seems to be part of human psychology, and it appears quite clearly that neither "philosophy" nor "civilization" can provide a proper protection against such a death drive . It is a matter of sensitivity, empathy, consciousness, whch can be transmitted but not demonstrated through reasoning. Thus only public opinion can prevent such practices. There are encouraging signs, and the fact that in Spain many political leaders have taken a clear position against corrida performances is encouraging.

Il y a déjà quelque temps, un distingué philosophe, qui plus est, directeur du département philosophie de l'Ecole normale supérieure, avait vanté le caractère sublime de la corrida. Quant au taureau, lorsqu'il combat, il ne soufre pas. Ce n'est évidemment pas le taureau qui nous le confie, mais un directeur de recherches sur la physiologie animale de Madrid qui le "sait".  La corrida est éthique en vertu du principe que "l'universalisme moral s'étend à l'espèce humaine et s'arrête à elle". Cet argument a beaucoup servi sous d'autres formes, dressant une barrière entre "nous", qui avons la chance d'être supérieurement intelligents et les autres. Le caractère "sublime" du spectacle, le jeu de la vie et de la mort, si impressionnant pour le spectateur assis dans son fauteuil, avait déjà servi à prolonger les combats de gladiateurs. Un jour, d'ailleurs, quelqu'un aura l'idée de réintroduire des êtres humains dans l'arène. Tout est une question de temps et d'argent. A ceux qui protestent, on évoque le respect de la "tradition".
Aux îles Féroé, qui font pourtant partie du très civilisé royaume du Danemark, la tradition consiste à tuer le plus grand nombre possible de dauphins  et de baleines. Cette pratique remonte au XVIe siècle comme "rite d'initiation".  Le massacre ou "grind" de centaines de dauphins se pratique en famille.  Il est aggravé par les moyens modernes (vedettes motorisées, hélicoptères) dont dispose la population pour chasser leurs victimes. Il semble que seule une faible partie de la viande est consommée.  Cette viande contaminée par des métaux lourds est en outre impropre à une consommation régulière.
Cette pratique, bien que contraire aux conventions reconnues au niveau européen, est soutenue par le gouvernement danois, au nom de la "tradition" (l'exception culturelle en quelque sorte) et cinq militants de l'association "Sea Shepherd" qui tentaient de s'y opposer ont été arrêtés.  L'attrait pour le massacre paraît ancré dans la psychologie humaine et malheureusement ni la philosophie ni la civilisation ne semblent en mesure de détourner les acteurs. D'autres facteurs doivent intervenir: la sensibilité, l'empathie, qui ne font pas l'objet d'un raisonnement mais doivent être ressentis. Il est donc nécessaire que l'opinion se mobilise, pour parvenir à supprimer de telles pratiques. Des progrès notables ont été enregistrés et le fait que la corrida soit de moins en moins bien perçue en Espagne, où des responsables de Podemos ont pris fermement position pour sa prohibition, est un signe encourageant. 

samedi 8 août 2015

Des centrales nucléaires intrinséquement sûres? / Intrinsically safe nuclear power plants?


Bill Gates, the richest man in the world, doubts about the future of renewable energy sources and has favoured an "intrinsically safe" nuclear energy.   In order to meet such a requirement, the nuclear plant has to remain safe along the whole processing chain. By using thorium, natural uranium or depleted uranium, it is possible to avoid the risks of nuclear proliferation, linked with uranium enrichment. It is also possible to limit the risk of  a diverging process leading to the melt down of nuclear fuel and accidents which occured in Tchernobyl and Fukushima. Finally, it is necessary to minimize if not eliminate dangerous radioactive waste. Bill Gates supports a project lead by TerraPower, a start-up he has financed, which develops a so called "progressive wave reactor". It is a fast breeder reactor, operating at high temperature, cooled by liquid sodium. In this reactor, a fission zone is moving progressively from the center to the periphery.  As a result, nuclear fuel might be introduced only once during the whole life of the power plant (breed-and- burn fast reactor).The concept is not yet proven and the cooling of the reactor when the fission zone is moving seems a problem (it is possible to move the fuel rods by robotic devices, but it makes the design much more complex). The "intrinsic safety" of the reactor does not seem demonstrated either. No miracle solution seems to exist and other concepts (molten-salt reactors, pebble bed reactors, accelerator-driven systems) have to be assessed in parallel. To day, Bill Gates seems rather cautious and supports also R&D long term renewable energy projects, such as artifical photosynthesis and high altitude wind energy.  His main idea is that investing in the R&D area should be the priority. In the energy area, there is presently no fully satisfactory option. Thus, innovative options are a key issue and Bill Gates is certainly right to consider that R&D is a priority.

Bill Gates, l'homme le plus riche du monde, doute des énergies renouvelables et parie sur l'avenir de l'énergie nucléaire, en cherchant à promouvoir une filière qui serait intrinsèquement sûre. La question mérite d'être posée. Dans quelles conditions une filière nucléaire serait-elle intrinsèquement sûre? Pour représenter une voie d'avenir, une telle filière doit également pouvoir fonctionner avec un combustible nucléaire suffisamment abondant et pouvoir être mise en œuvre de façon économiquement acceptable. Pour être intrinsèquement sûre, elle doit pouvoir exclure tout risque majeur tout au long de la chaîne:
1) En utilisant du thorium, de l'uranium naturel ou de l'uranium appauvri, on évite les risques de prolifération associés à l'enrichissement de l'uranium. On manipule un combustible moins dangereux que l'uranium 235.
2) En utilisant un combustible fertile, mais non fissile, comme le thorium 232 ou l'uranium 238, on peut limiter les risques de poursuite des réaction en chaîne qui ont provoqué la fusion du combustible à Tchernobyl comme à Fukushima. Il est nécessaire toutefois dans ce cas de disposer d'une source de neutrons extérieure pour entretenir la réaction.
3) Les déchets doivent présenter peu de danger. Les centrales au thorium produisent beaucoup moins de déchets dangereux. Les filières de quatrième génération permettent de réduire sensiblement la quantité de déchets à haute radioactivité et longue durée de vie.

jeudi 30 juillet 2015

Les niveaux de réalité / Levels of reality

 
Science is often perceived as giving access to the only existing reality. Although materialism boasts about admitting this only tangible reality, contemporary science does not support such a reductive view. It becomes increasingly difficult to consider that it is possible to get access to a single realityPhysical reality is represented by more and more abstract mathematical models. It becomes increasingly difficult to know if the representation they deliver should be considered as real. It is quite conspicuous in the case of parallel worlds, described by present models. Should they be considered as "real" or as mere assumptions.  The process through which reality is  perceived can also modify the representation of the observed reality .  This situation has lead the  physicist Werner Heisenberg, one of the founders of quantum mechanics, to consider different levels of reality. At the level of the macroscopic world, reality is defined as independent from the knowledge process. At the quantic level,  it dépends from the knowledge process. At the conscious level, at which philosophical, artistic and religious experiences take place, it is directly linked with the knowledge process itself. 
   To consider that consciousness might occur at a level of reality which differs from the usual material reality can help to explain why the usual scientific methodology is unable to explain it. It becomes possible to include within a global vision  of reality the realms of art,  litterature and interior life, without setting them at the same level as the physical world.

La science est souvent conçue comme donnant accès à une réalité, qui serait à la fois vraie et unique. Le matérialisme se targue de n’admettre que cette seule réalité tangible. La science contemporaine a pourtant mis à mal une conception aussi réductrice de la réalité. Certes, celle-ci garde un caractère objectif, en raison de la résistance qu’elle présente lorsque l’on tente de la conceptualiser. Par contre, il devient de plus en plus difficile d’affirmer que la connaissance issue de l’expérience permet d’accéder au réel lui-même. A une réalité immédiate et concrète, se substitue une représentation de plus en plus abstraite. La valeur du modèle mathématique capable d’en rendre compte correctement ne tient pas à une vérité qu’il détiendrait, mais à la précision avec laquelle il est capable de prédire un phénomène physique, ce qui impose d’adopter toute modification du modèle, capable d’améliorer sa capacité de prédiction.  On peut le constater clairement dans le cas des univers parallèles. En admettant que les modèles mathématiques issus de l’observation de notre Univers amènent à décrire des univers parallèles, peut-on les considérer comme réels? Ils le sont, si le modèle mathématique qui les prédit est suffisamment bien établi. En même temps, leur existence ne peut être admise comme certaine, car ils échappent à jamais aux observations humaines. Selon le physicien Mark Tegmark, la réalité du monde physique serait de nature mathématique. De ce fait, il faudrait penser que tous les mondes prévus par les modèles mathématiques existent réellement, même s’ils ne peuvent pas être observés. Ce point de vue reste isolé. Toutefois, il amène à se poser un certain nombre de questions difficiles. Les mathématiques représentant le monde physique sont-elles dotées d’une réalité intrinsèque ou simplement issues de l’esprit humain ? Le point de vue platonicien consistant à affirmer leur réalité intrinsèque a été défendu par d’éminents mathématiciens tels que René Thom, Alain Connes et Kurt Gödel, qui avaient la conviction, au cours de leurs recherches mathématiques, de découvrir un monde préexistant. En admettant que les mathématiques aient une réalité en soi, quel lien existe-t-il entre le monde de la physique et celui des mathématiques ? Le philosophe des sciences Roland Omnès opte pour le réalisme de ces deux domaines, tout en admettant qu’il demeure entre ces réalités une béance, qu’il n’est pas possible pour le moment de combler entièrement.

jeudi 9 juillet 2015

Transition ou rupture? / Transition or disruption?

"The age of transitions" is the last book written by the Belgian philosopher Pascal Chabot. For the author, the transition is the good change, the "desired change". He even claims that philosophy is the "thought of transitions", which is not quite convincing, especially when he refers to the myth of the cavern used by Plato. In fact, the transitions he mentions are not philosophical or even cultural, but social and economic. He mainly quotes the energy transition and the demographic transition and pleads for a generalized "transitology". In his view,  any disruption is impossible, because the world has become too complex for sustaining a disruption. Such a fear is understandable , but the argument seems too simple.  It would have been necessary to explain first that  a change is needed, because the present globalization is clearly unsustainable, as it is not possible to carry on undefinitely an exponential growth.  The transition corresponds to a voluntary inflexion. Still, it is not clear at all that the rulers of the present globalized world will be able to decide spontaneously such a change . The gap between words and reality is growing and, therefore, the risk remains high that the change will occur not through a transition, but through a disruption. The complexity of the technical and economic system does not decrease, but rather increase such a risk, as a society which becomes very complex is also less resilient, as shown by the historian Joseph Tainter. In such a case the whole present civilization might collapse, either due to an environmental catastrophy, or a globalized military conflict. Then it will be too late for any transition, as all transitions require time.

Le dernier ouvrage du philosophe belge Pascal Chabot s'intitule "L'âge des transitions". Selon l'auteur, la transition, c'est le bon changement, "le changement désiré". Certes, et c'est aussi, pourrait-on  ajouter, "le changement maîtrisé". L'auteur va plus loin et affirme que la philosophie est "la pensée des transitions". Cette affirmation est plus discutable, surtout quand elle s'appuie sur l'exemple de la caverne de Platon. Le terme de transition ne semble guère approprié pour évoquer l'éveil ou la conversion du regard, qui font passer de l'obscurité à la lumière, des illusions à la vérité. 
   De fait, les principales transitions qu'évoque l'auteur ne sont pas philosophiques, mais économiques et sociales. Il évoque, notamment,  la transition énergétique et la transition démographique et exprime son penchant pour une "transitologie" généralisée. En effet, selon lui, la rupture est devenue impossible. Toute posture radicale est désuète, car le monde est devenu trop complexe. On ne peut plus le bouleverser sans le détruire. On peut comprendre la crainte qu'exprime Pascal Chabot d'une destruction qui deviendrait irrésistible. Il s'agit là toutefois d'un point de vue qui peut sembler quelque peu limité, voire naïf. Il faudrait d'abord expliquer pourquoi le changement est devenu indispensable.

dimanche 5 juillet 2015

L'illusion financière / The financial illusion

Gaël Giraud is a brilliant French mathematician and economist, who is also, since recently, a catholic priest and a jesuit. His book about the "Financial illusion" presents very clearly rather complex concepts. He shows  that the 2008 crisis was caused by a huge Ponzi pyramid, while asset "securitization" was a way of transmitting to others doubtful accounts. He explains the huge amplification of an institution failure due to Credit Default Swaps and how private debts have been transformed into public debts. He shows also that giving to the banks the power of currency creation is a way to divert a Commun good towards private interests. One of the major points of his demonstration about the "Financial illusion" is the fact that Markets cannot be fully efficient due to the incompleteness of the Markets i.e. the absence of the needed information, as the prices alone cannot provide a fully rational signal. His books sounds therefore as a thorough deninciation of the politics followed during the past twenty years. A question remains about the title. Is it really an illusion? Isn't a very clear strategy for diverting money and power? Therefore, how to change such a situation? It seems doubtful that those who benefit from such practices will spontaneous accept to change the situation. A strong push coming from the public opinion will be required. The general public must be informed and the book by Gael Giraud can help to do that.

Gaël Giraud est un brillant économiste. Le choix qu'il a fait d'entrer chez les jésuites et d'être ordonné prêtre montre sa volonté de concilier cette vocation de mathématicien et d'économiste avec un idéal.
L'ouvrage qu'il a rédigé sur "L'illusion financière" est un modèle de clarté. La lecture de cet ouvrage, pourtant écrit avec beaucoup de retenue, illustre parfaitement l'étendue des dérives financières. Il montre d'abord que l'origine de la crise de 2008 provenait d'une énorme pyramide de Ponzi. Il explique ensuite comment la titrisation des créances a permis de transférer à d'autres, notamment en Europe, les créances douteuses émises aux Etats-Unis, avec la complicité d'agences de notations bienveillantes. Il expose le mécanisme diabolique des CDS (Credit Default Swaps),  qui permettait de gagner des sommes énormes en misant sur la défaillance d'une institution, dont on n'est pas partie prenante, rendant ainsi très avantageuse une telle défaillance pour ceux qui en avaient fait le pari. Il montre comment les dettes privées sont devenues des dettes publiques.

samedi 6 juin 2015

Le Minotaure planetaire / The Global Minotaur


The Greek finance minister, Yanis Varoufacis is indeed a brilliant personnality, as his book "The Global Minotaur", now translated in French, seems to demonstrate. His reference to the myth of the Minotaur describes in a vivid way what has happened in the World during the recent years. The Minotaur is the monster with a human body and a bull head which was emprisonned in the Labyrinth by Minos, the king of Crete. Each year Athenians had to send as a tribute youths and maidens to be devoured by the Minotaur. Yanis Varoufacis uses this myth for describing the system which lead to the 2008 crisis. Through this system, United States were permanently importing large amounts of goods from China and Germany, while increasing both their commercial and budget déficits. The system could operate because the "surplus economies" were reinjecting their profits back to the US. For him, the Minotaur has been killed as a result of the 2008 crisis, but the world economies have not found yet any alternative system. As a result, China and the European Union economies are staggering, while the US economy is trying to reduce its deficit through Quantitative easing, i.e. currency creation. Therefore, it does not seem clear that the Minotaur is really dead. An interesting feature of the myth, which is not developed by Yanis Varoufacis is related to the Labyrinth where the Minotaur dwells. The complexity of the financial sytem exploiting digital technologies is such that it has become impossible to control it. Therefore, we need to find the Ariadne thread, which might help to find our way within the maze leading to the monster, if we want, if not to kill it, at least to tame it..

Le ministre des finances grec, Yanis Varoufacis est certainement un esprit brillant. Son ouvrage intitulé "Le Minotaure planétaire" ("The Global Minotaur") semble en tout cas le démontrer. L'image qu'il adopte pour évoquer la crise qui continue de frapper le Monde redonne une actualité tout à fait appropriée au mythe ancien du Minotaure. Le Minotaure est ce monstre, mi homme, mi taureau que le roi de Crète Minos avait enfermé dans un labyrinthe. Les Athéniens devaient payer comme tribut l'envoi chaque année de jeunes gens qui étaient dévorés par le monstre. Yanis Varoufacis se sert de ce mythe pour décrire le système qui a abouti à la crise de 2008. Le rôle du Minotaure est joué par l'économie américaine absorbant les exportations venant de Chine et d'Allemagne, tout en creusant son déficit commercial et son déficit budgétaire. Le système a pu fonctionner tant que les pays exportateurs ont compensé  le déficit américain en réinjectant dans l'économie américaine les revenus tirés de leurs exportations. Selon Yanis Varoufacis, la crise de 2008 a cassé ce système (mort du Minotaure). Il en résulte un ralentissement de l'économie mondiale, ni l'Union européenne, ni la Chine ne parvenant à compenser la baisse des exportations par une croissance du marché intérieur. En outre, les Etats-Unis ont été contraints de passer à des mesures de "Quantitative easing" consistant à recourir à la création monétaire, dont on mesure encore mal les effets pervers, qui ne manqueront pas de se manifester. En définitive, on peut donc se demander si le Minotaure est mort et si le véritable Minotaure n'est pas représenté par la finance dérégulée actuelle.

mardi 19 mai 2015

Les limites de la puissance technologique / The limits of technological power


Technology seems to dominate not only our everyday life, but also the future. The world of tomorrow is viewed in terms of robotics, artificial intelligence, space traveling and technology-enhanced life. Still,  the threats linked with technology become more and more oppressive. Global warming, environmental degradation, rarefaction of resources and massive destruction weapons question humanity survival. An ecological collapse or a nuclear destruction become increasingly plausible. Technology seems to evolve on its own in quest of an ever-growing power, using man as a tool for achieving this goal. In front of this dazzling progression, human ideals evolve only slowly and sometimes even regress. Democracy, justice , peace and human rights seem to falter. While technology becomes overwhelmingly powerful, life remains fragile as ever. The way technology power will be used to-morrow represents an increasingly crucial issue. The ethical imperative becomes essential.

La technologie exerce une telle domination sur la société d’aujourd’hui, que la plupart des réflexions sur l’avenir passent par une représentation de ses futurs accomplissements. Le monde de demain, perçu à travers ce prisme, est conçu comme un monde de robots, d’intelligence artificielle, de navigation spatiale et de vie humaine indéfiniment prolongée. Il s’ouvre sur des promesses constamment renouvelées.Pourtant, cette vision prométhéenne d’un avenir exalté par la technologie est entachée d’inquiétudes croissantes. Les menaces qui pèsent sur le monde deviennent de plus en plus oppressantes. Le réchauffement climatique, la dégradation de l’environnement et la raréfaction des ressources pourraient conduire à un effondrement écologique, mettant en péril la survie de l’humanité. En outre, l’usage incontrôlé de la technologie entraîne des risques croissants d’accidents, que ce soit dans le secteur de nucléaire ou dans celui de la manipulation génétique d’organismes vivants. Le développement d’armements de plus en plus performants alimente des conflits incessants. Parmi tous ces périls, le risque d’apocalypse nucléaire, suite à un conflit incontrôlé, est sans doute le plus grave.

jeudi 7 mai 2015

Ecospiritualité / Ecospirituality


Discovering the same source of consciousness within all living beings leads to a deep modification of the relationship with the environment. Feeling a vibrating consciousness helps to relocate the sacred within nature. Henry David Thoreau relates such an experience when living near Walden Pond. Earlier, Jean-Jacques Rousseau had a similar experience, which he relates within his book "The Reveries of a Solitary Walker". The attitude towards nature has deeply changed. It is no more considered as a free store providing resources and a discharge for waste. Man is now considered as responsible for its preservation and maintenance.   The deep ecology movement initiated by Arne Naess questions the anthropocentrism of usual attitudes towards nature. Biosphere and all living beings have a value by themselves and not only related to their utility for man. Nature is also a source of meaning, a call for a more beautiful and harmonious life. Respecting nature is a moral duty, one of the foundation of future ethics. Beyond ecology, a deeper world vision opens on an "ecosophy". Nature is perceived as sacred, leading to an ecospirituality, which is not confined to believers, but is also accessible to all those who are able to contemplate nature with attention.and an open mind   .


Découvrir chez tous les êtres vivants la même source de conscience que celle qui anime chaque être humain amène à modifier profondément la relation avec l’environnement. Sentir une conscience vibrante tout autour de soi permet de retrouver la présence du sacré au sein de la nature et d’entrer en communion avec elle. Au XIXe siècle, l’écrivain américain Henry David Thoreau, a été l’un de ceux qui ont été profondément marqués par un tel sentiment. Il a passé deux années complètes à vivre en autarcie au bord de l’étang de Walden, pour être en communion étroite avec la nature, comme il l’a raconté dans un récit de sa vie[. Son cas est loin d’être isolé. Déjà au siècle précédent, Jean-Jacques Rousseau avait décrit ses promenades solitaires en des termes comparables. L’attitude vis-à-vis de la nature a considérablement évolué. Elle n’est plus considérée comme un simple magasin, dans lequel on peut puiser les ressources nécessaires et rejeter les déchets produits. L’idée d’une responsabilité humaine dans sa préservation et son entretien a fait son chemin.
   Il ne suffit pas de limiter la pollution de l’air et de l’eau. Il s’agit aussi de préserver les espaces verts et de conserver une nature belle et vivifiante. La nature est vivante et mérite le respect. Tous les êtres vivants et pas seulement les êtres humains doivent être protégés. L’image de Gaïa, employée par l’écologiste britannique Lovelock, pour décrire les similitudes de la Terre avec un organisme vivant, présente l’avantage d’être particulièrement évocatrice[. La nature a retrouvé sa place parmi les grands mythes qui alimentent l’imagination humaine.
   Le mouvement de l’écologie profonde (deep ecology), initié par le norvégien Arne Naess, remet en cause l’anthropocentrisme des conceptions habituelles de la nature. Pour l’écologie profonde, la biosphère et les êtres vivants qu’elle abrite ont une valeur en soi, indépendamment de leur utilité pour l’homme. Celui-ci ne peut pas s’arroger le droit de détruire la nature sans commettre une faute morale.

vendredi 24 avril 2015

L'énigme de la conscience / The enigma of consciousness



Despite its central role, consciousness remains mysterious. Its nature raises many questions. The impossibility to explain how it works has lead some scientists to deny its existence. They are able to connect a conscious behavior to neural activity, but deny any reality to subjectivity itself. Thus, Daniel C. Dennet considers that consciousness is an illusion, a magician trick. To admit a reality of consciousness is presented as equivalent to accepting the dualism of Descartes, who considered a physical body (rex extensa) and an immaterial soul (res cogitans).  Still, connecting logical thinking to neural activity does not explain the presence of consciousness. For David Chalmers, the "hard problem" of  consciousness cannot be explained by any present physical theory. This impossibility extends to all qualia, subjective impressions and sensations. Various attempts have been made for explaining the specificity of consciousness. Some of them try to explain it by systems theory as an emerging state.  Douglas Hofstadter describes consciousness as a "strange loop", a kind of auro-referent system. Some scientists have tried also to explain the specificity of consciousness, by a quantic coherence, preserved at the macroscopic scale. Roger Penrose thinks it can be located in some microtubules, present in the brain cells. Still, consciousness remains unexplained and seems to be located at a different level of reality. Recognizing its reality has considerable implications, as its draws a clear frontier between conscious beings (human beings and most certainly animals) and incouscious things, such as computers, whatever their complexity.

La conscience, comme source de la subjectivité, se distingue du mental, siège du raisonnement, tout en lui étant associée d’une façon qui reste inconnue à ce jour. Alors qu’elle se situe au centre de l’être, la conscience demeure mystérieuse. Sa nature et son fonctionnement posent de nombreuses questions, qui restent pour le moment sans réponse.  Dans l’expérience immédiate et subjective, la conscience se présente comme un état cohérent et global, dont la nature diffère de celle des objets qu’elle perçoit. Elle est, par là même, distincte du corps et des organes qui le composent, tout en restant étroitement liée à ce corps, qui lui transmet des sensations. En devenant conscientes, les idées et les sensations contribuent à rendre cohérent le fonctionnement d’un organisme. Associée au mental, qui explore constamment toutes les options possibles, la conscience oriente la conduite de l’être vivant. Elle anime le désir de survie et contribue à coordonner l’ensemble de l’organisme vers ce but. Elle a pu jouer ainsi un rôle important au cours de l’évolution, en attribuant un avantage décisif à un organisme conscient. A ce titre, elle apparaît comme le vecteur du sens, se limitant à un instinct de survie chez les êtres vivants les plus simples et évoluant progressivement vers des valeurs de plus en plus élevées dans le cas de l’être humain. Son caractère inexpliqué a conduit scientifiques à en nier toute réalité effective.

lundi 6 avril 2015

Les niveaux de réalité / Levels of reality


 
Science is often supposed to open access to a single tangible reality, which would be the only true according to materialism. Still, contemporary science shows that reality is more complex than that. In most cases, it can be perceived only through abstract mathematucal models. Furthermore, the information depends upon the measurement process. Thus, quantum mechanics concepts differ considerably from the classiical mechanics framework. The great physicist Werner Heisenberg has proposed to consider three levels of reality when considering the objects which are perceived.  At the first level, which corresponds to classical physics, they do not depend upon the knowledge process. At the second level, which corresponds to quantum mechanics, they depend upon this knowledge process. Finally, at the third level, they depend only upon the subjective realm. This third level corresponds to the artistic, philosophic and religious experience. This idea was further developed by the physicist and philosopher Basarab Nicolescu, who introduced in his approach the principle of the third included principle, defined by Stephane Lupasco. According to this principle, two terms which are contradictory at a certain level can become non contradictory at another leveL
Thus the concept of "levels of reality" has far-reaching implications and might help to reach a much broader approach of reality.

La science est souvent conçue comme ouvrant accès à une réalité unique, qui serait la seule vraie. Le matérialisme se targue de n’admettre que cette seule réalité tangible. La science contemporaine a pourtant mis à mal une telle conception de la réalité. Certes, la réalité garde un caractère « objectif », en raison de la résistance qu’elle présente lorsque l’on tente de la conceptualiser. Une théorie qui est invalidée par une observation expérimentale ne peut être considérée comme vraie, quelque séduisante qu’elle puisse apparaître par ailleurs. Par contre, il devient de plus en plus difficile d’affirmer sans ambiguïté la « réalité » des informations auxquelles la connaissance issue de l’expérience permet d’accéder. A une réalité simple et concrète, se substitue une réalité de plus en plus lointaine, dont seul un modèle mathématique peut offrir une description correcte. 

samedi 28 mars 2015

Prospective des idées / Ideas Futuring



Futures studies are considering evolutions which remain uncertain, but still need to be anticipated as best as possible, due to their large potential consequences. They present a strong interest in the area of ideas evolution, which are difficult or even impossible to predict in a quantitative way. Futures studies cannot be substituted to existing methods, but can help to understand the stakes ahead, by combining different approaches from human sciences, such as sociology, anthropology, history and philosophy. Some attempts have been made for understanding the evolution of ideas, but  futures studies have been seldom applied to this area. In France, Thierry Gaudin applied such methods for trying to imagine the future of religions, but this attempt has remained isolated. A few studies exist about the mutations of culture. Futures studies are most often focused upon the technological progress (robots, A.I., aerospace), but there is a growing need to understand wether or not human beings will be able to master the huge power provided by technology. Thus, futures studies need to be undertaken in the area of culture and ideas. A cultural shift, such as a renewal of spirituality might become a prerequisite for the survival of humanity.

Les méthodes de la prospective visent à mener une réflexion sur les évolutions possibles en avenir incertain. Elles présentent de ce fait un intérêt particulier dans le domaine des idées, car celui-ci ne se prête que très difficilement à des modélisations quantitatives et prédictives. La démarche prospective aide à mieux appréhender les enjeux globaux auxquels la société est confrontée, en associant toutes les disciplines qui peuvent aider à comprendre la marche des idées : sociologie, anthropologie, histoire, philosophie. Elle s’inscrit dans la perspective de l’histoire « longue », car il s’agit de discerner les grandes tendances concernant l’évolution des idées. Elle nécessite une analyse des réseaux d’échange des idées, pour comprendre comment elles changent en se transmettant. Une telle analyse a été tentée pour suivre le cheminement des idées en philosophie. La méthode suivie consiste à essayer de comprendre comment se forment et se propagent les différentes Écoles de pensée à partir d’une connaissance des réseaux d’échange entre différents penseurs, tout au long des âges 

mercredi 11 mars 2015

La société des écrans / The society of screens


Numerical technologies connect presently practically all the inhabitants of the planet. At each moment, it has become feasible to keep informed about what happens in any place of the world. Jeremy Rifkin considers that it is the sign that we are entering in a new era, "the civilization of empathy". According to Jeremy Rifkin, by connecting most people of the planet, Internet facilitates the development of an empathic relationship between all of them. One of the consequences he foresees, is the development of what he calls a distributed capitalism, and the growing use of "peer to peer" transactions.
   Although such an evolution is highly desirable, it is not obvious that we are really moving that way. The main consequence of Internet has been the development of financial activities at a global scale, which are operated in a way which has nothing to do with empathy. We are creating a society of screens, through which most transactions are operated now. Such a situation extends even to areas such as war, blurring the distinction between  videogames and reality, in a most disturbin way. Furthermore screen pictures can be manipulated, giving a wrong perception of reality. As shown by the italian linguist Raffaele Simone, Internet culture is based upon direct and most often emotional emotions, rather upon rational thinking. Since, the concept of empathy is somewhat dangerous as hatred is its counterpart. Still, the overall picture is more complex as the Internet helps also to gather a diversity of viewpoints and appears as the main area of freedom.

Les technologies numériques relient à présent pratiquement l’ensemble des habitants de la planète. à chaque instant, il est possible de s’informer sur tout ce qui se passe dans le monde. Il est également devenu beaucoup plus facile de voyager et de rejoindre n’importe quelle autre région. Les différences dans les modes de vie tendent à s’estomper. Les mêmes produits et les mêmes marques sont utilisés partout. Jeremy Rifkin n’hésite pas à voir dans cette évolution l’avènement d’une « civilisation de l’empathie ».   
   D’après Jeremy Rifkin, en connectant chaque personne à une très large collectivité, l’Internet favorise le développement des relations empathiques entre l’ensemble des habitants de la Terre. Cette évolution conduirait également, selon lui,  à une nouvelle forme de capitalisme, qu’il qualifie de « capitalisme distribué ». Celui-ci verrait le triomphe des transactions « peer to peer » entre individus, favorisant un développement du lien social.

mercredi 18 février 2015

Holarchie, modèle de la société de demain? / Holarchy, a model for the society of to-morrow?


The complexity of human organizations is growing constantly, due to technical progress and the cumulative amount of all the information which is processed. Therefore, the issue of mastering this growing complexity is becoming critical. The easiest way for mastering complexity is to operate at different levels of complexity, each level of complexity being able to perform certain tasks. Derived from this idea, Arthur Koestler has introduced the concept of "holon". Each holon forms a sub-system, coherent and able to act in an autonomous way, but also connected to other holons. By assembling holons, it becomes possible to obtain a new holon, at a higher level,  able to perform tasks which cannot be achieved by a single holon.  Holarchy is an organizing model applicable to any system, consisting in defining sub-systems operating as holons. Any living organism is operating in this way, cells and organs forming separate entities, which ensure the proper operation of the whole body.  Such a model has inspired new ways for organizing companies or administrations. Holocracy is a trademark for a certain type of organization, which has already been adopted by certain companies mainly in the US. It aims at  promoting autononomy and initiatives in each self-organizing  group (or "circle") belonging to an organization. Such an organization might therefore anticipate future ways for social organization, in many areas, including national and international governance.

La complexité des organisations humaines croît constamment, de façon cumulative, en suivant le progrès technique. La question se pose de savoir comment maîtriser cette complexité. L'enjeu est important, car il concerne la survie même de la société. Ainsi, l'historien John Tainter a attribué la chute de l'Empire romain à l'incapacité de l'administration romaine à maîtriser la complexité croissante de son organisation.
Le principal moyen de maîtriser la complexité consiste à introduire des "niveaux de complexité", chaque niveau étant autonome pour un certain nombre de tâches, tout en étant relié aux autres niveaux. Sur ce principe, Arthur Koestler a introduit la notion de "holon", formant un sous-ensemble cohérent et autonome, mais relié aux autres holons. Pour montrer l'intérêt des holons, Arthur Koestler a inventé la parabole des deux horlogers, en train d'assembler une montre. Tous deux sont interrompus périodiquement dans leur travail, mais l'un des deux achève son travail beaucoup plus vite que l'autre, car sa montre est constituée de modules, qu'il ne doit pas monter à nouveau lorsqu'il est interrompu. En assemblant des holons, il est possible de réaliser des fonctions qui ne sont pas accessibles à un holon isolé et ainsi obtenir des holons de niveau supérieur. L'holarchie est un principe d'organisation, sur le modèle d'un organisme vivant, opérant selon un tel système de structures emboitées, chacune étant capable d'effectuer de manière autonome les taches à effectuer à son niveau, en étant reliée aux autres structures (holons). Ce modèle d'organisation a été codifié dans le cadre d'un mode d'organisation qui a été appelé "holocratie" et a fait l'objet d'un dépôt de nom de marque. Ce mode d'organisation, qui a été adopté par des compagnies, principalement aux Etats-Unis, vise à concilier la nécessité de laisser un maximum d'autonomie et de susciter l'initiative à chaque niveau, tout en faisant participer l'ensemble de la compagnie à des objectifs communs, la raison-d 'être de la compagnie. A ce titre, il s'agit d'un modèle d'organisation intéressant, qui préfigure peut-être des modes d'organisation futurs de la société.

samedi 14 février 2015

Peut-on réenchanter le risque? / Accepting the Risk?

In a In In  a recent book, the sociologist Gérald Bronner proposes a "reenchantment" of the risks. But what are the acceptable risks? Any human activity presents a risk and the author is probably right, when he criticizes the precautionary principle, which can easily lead to inaction. Still the risk issue cannot be dismissed so easily. Global technological risks are growing. Among them, major risks include nuclear weapons, the biological threat, global warming. Political leaders seem unable to understand them and even less to master them. We may close to a point when global risks might rise at a higher rate than the advantages brought by the technological progress. This situation has to be appraised carefully, with lucidity and discernment. Still, the author has two more arguments for convincing us to accept them . The first one is that anyway Earth will disappear in the future. Therefore, we should not worry too much. The second, is that the number of exoplanets that we discover outside our solar system is growing rapidly. Therefore, if the Earth is destroyed, humanity should be able to reach an exoplanet where it might migrate.

Dans un ouvrage récent, le sociologue Gérald Bronner propose de "réenchanter" le risque. Cette proposition conduit immédiatement à la question de savoir quel est le niveau de risque acceptable. Certes, le risque zéro n'existe pas. Toute activité humaine comporte un risque, car le résultat de toutes les actions humaines est incertain. Dès lors, on peut rejoindre l'auteur pour juger calamiteux le principe de précaution, car il favorise la déresponsabilisation, l'inaction devenant le meilleur moyen de ne pas se retrouver devant un tribunal. Pour autant, la question du risque ne peut pas être évacuée si facilement, car les risques encourus par l'humanité sont devenus considérables. Curieusement, l'auteur cite des situations plutôt anecdotiques, telles que la suppression de l'eau de Javel dans les hôpitaux, mais n'évoque pas les risques technologiques majeurs: une destruction de la planète par les armes thermonucléaires, le risque biochimique, un réchauffement climatique incontrôlé. Ces risques globaux sont d'autant plus préoccupants que les dirigeants politiques actuels semblent en mesure de les comprendre et encore moins de les maîtriser.  Tant que la menace ne s'est pas concrétisée, on peut toujours considérer qu'ils sont imaginaires. Malheureusement la destruction de la Terre est une expérience que personne ne pourra reproduire à loisir.Ces risques n'ont rien d'enchanteur.

vendredi 6 février 2015

Devenir soi / Achieving personal fulfillment


In his last book, Jacques Attali is advocating a quest for personal fulfillment.  After having met many high rank political and economical leaders, he draws  disillusioned  conclusions about the World situation. He thinks that evil is omnipresent and that political leaders are unable to bring the right solutions. Therefore, it becomes impossible to rely upon anybody. No help can be expected from companies or from the State. The only positive option which remains is to change oneself, in order to change the world. Jacques Attali quotes numerous examples, from Gandhi to Steve Jobs, from Bouddha to Picasso of those who were able to change their destiny, by changing oneself. Such a message seems a correct appraisal of the present crisis and trying to change oneself, the most appropriate answer. Still, it is probably an illusion to think that becoming Gandhi or Steve Jobs is just a matter of "mind shift". The destiny of an individual person depends upon her gifts but also upon the society where she lives.. Therefore, it is probably necessary to proceed a step further and before trying to change the world, to undertake an internal change, a "soul therapy", as expressed by Cheikh Khaled Bentounès.

Dans son dernier ouvrage, Jacques Attali conseille de "devenir soi". L'évolution qu'il a suivie est intéressante. Après avoir assumé de nombreuses responsabilités, il parvient à des conclusions désabusées. Il constate que le Monde va mal et pense même qu'il va vers une "somalisation" généralisée. Les responsables politiques s'avèrent incapables de changer le Monde. Les citoyens deviennent des assistés, qui attendent tout des autorités, des "résignés-réclamants". Dans ce sombre contexte, il faut avoir "le courage de ne compter sur personne, d'oser ne rien attendre des autres: ni amour, ni argent, ni soutien, pas plus de sa famille, de ses amis, de ses relations, des autorités qui représentent les autres, que de quelque sauveur que ce soit. En particulier, il ne faut attendre aucun secours des patrons, ni de l'Etat". Dès lors, la seule option qui reste ouverte consiste à prendre son destin en main, pour se transformer soi-même et par là, contribuer à changer le monde. Dans son ouvrage, Jacques Attali, cite de nombreux exemples, de Gandhi à Steve Jobs, de Bouddha à Picasso, de ceux qui ont su prendre leur destin en main.
Le message reflète bien l'époque de crise que nous vivons et dans ce contexte il est effectivement judicieux de chercher d'abord à se changer soi-même. Toutefois, il serait illusoire de penser qu'il suffit de ses prendre en main pour devenir Steve Jobs ou Gandhi. Toute personne qui réussit une œuvre extraordinaire est le reflet de la société dans laquelle il vit. Une société en crise est incapable de susciter le génie. Il faut sans doute aller encore un peu plus loin, pour oser affirmer que le changement doit être d'abord intérieur et passer par une "thérapie de l'âme", selon l'expression du cheikh Khaled Bentounès.

dimanche 25 janvier 2015

Au delà du relativisme / Beyond relativism



According to the contemporary relativism, there is no reality as such, but only points of view, to which no hierarchy can be applied. As a consequence, no opinion can be considered as true. All cultural or social behaviours are equivalent and result only from an individual or collective preference. This relativism is partly the consequence of the disparition of any form of transcendance, but also the logical consequence of a merchant order, for which the value of everything is determined only by its price. As this price fluctuates due to the Market, the value fluctuates as well. Such a situation can be perceived as positive. Thus the sociologist Michel Maffesoli is quite happy about this "polytheism" of values, which he perceives as a sign of liberty.  But this relativism leads also to a dangerous crisis of meaning which affects the contempory world. It can also result into a denial of reality which can have quite detrimental conséquences. The philosophers Maurizio Ferraris and Gabriel Markus have proposed to consider a "New Realism". This New Realism does not propose a new defintion of reality, but it aims at introducing a new approach after thirty years of postmodernism. According to this approach, the existence of a reality independant from all the points of view which can be expressed is fully accepted. Therefore, some points of view may be in better accordance with this reality than others.

Selon le relativisme contemporain, il n’existe pas de réalité en soi, mais uniquement des points de vue, auxquels il est impossible d’appliquer une quelconque hiérarchie. De ce fait, aucune opinion ne peut être considérée comme vraie. Toutes les pratiques culturelles ainsi que tous les modes de vie, qui résultent de simples préférences individuelles ou collectives, se valent. Ce relativisme peut être interprété comme la conséquence d’un ordre marchand déclinant. Il résulte, pour une part, du rejet de toute forme de transcendance. Il découle également de la domination par l’argent de la vie sociale. La valeur de toute chose et de tout acte est fixée par son prix, qui fluctue au gré des demandes, comme toutes les valeurs en Bourse. Rien ne peut être considéré comme faux, laid ou immoral à partir du moment où un acheteur est prêt à le payer.
   Certains, comme le sociologue Michel Maffesoli se réjouissent de cette pensée pluriforme, de ce « polythéisme des valeurs », selon l’expression de Max Weber, de ce rejet de toute certitude, y voyant le signe d’une liberté retrouvée. Pourtant, ce relativisme conduit inévitablement à une destruction de l’ethos qui anime la Société, et risque ainsi de la précipiter dans le déclin. Dans le domaine de la pensée, le relativisme ne peut persister sans sombrer dans la stérilité. A l’image de la « destruction créatrice », dont Schumpeter parlait en économie, il pourrait toutefois être annonciateur d’une nouvelle vague de sens et de valeurs.
   Le danger d’une coupure avec la réalité et l’objectivité a conduit les philosophes Maurizio Ferraris et Gabriel Markus à proposer la fondation d’un « nouveau réalisme ». L’idée centrale de ce mouvement de pensée consiste à affirmer l’existence d’une réalité ontologique, échappant à tous les concepts, qui serait donc capable de résister à toute forme de relativisme. La crise du sens que traduit la prédominance du relativisme n’est sans doute pas définitive et pourrait simplement augurer de changements radicaux affectant l’ordre marchand actuel. 

samedi 17 janvier 2015

Chocs et contre-chocs pétroliers / Oil crisis or oil glut?

The spectacular fall of the oïl price from more than 100 $ per barril down to less than 50 and the increase of US shale oïl production might suggest that the issue of peak oïl is far behind us. Is it really the case? Since many years, the evolution of the oïl price is characterized  by large fluctuations. The two first oïl crisis, in 1973 and 1979, were due to the political situation in the Middle-East. The consequence of the large increase in the oïl price at that time was a boost of other oïl sources, mainly offshore production and a significant decrease of the OPEC share of the oïl production. Saudi Arabia and other OPEC members fully understood the risk behind such a trend. As a result, oïl prices remained very low for a long period, discouraging the efforts of consuming countries  to reduce their oïl dependance. By 2008, a new large increase happened as a result of the reduction of the investments during the previous years combined with intense speculation. The present drop is due to a sluggish demand as a result of the economic crisis and an increase of the US production, but even more to the will of Saudi Arabia to avoid a further increase of the oil production outside OPEC. By refusing to reduce its level of production, Saudi Arabia wants to eliminate competing energy sources, shale oïl and also renewable energy sources. It does not mean that oïl resources have suddenly increased and that the threat of an oïl peak does not exists any more. In fact, if the oïl price remains at the present level for a comparatively long period, it might induce a future oil crisis more intense than ever.

La chute spectaculaire des cours du pétrole, de plus de 100$ par baril à moins de 50 ainsi que  l'accroissement de la production de pétrole de roche-mère aux Etats-Unis pourraient nous faire croire que la problématique du peak-oïl dont il était tant question il y a quelques années est derrière nous et que l'abondance du pétrole est assurée. Qu'en est-il vraiment?  Depuis longtemps, l'évolution des cours du pétrole est marquée par des fluctuations de grande ampleur. Chocs et contre-chocs se succèdent. Les deux premiers chocs de 1973 et 1979 ont été dus à la situation au Moyen-Orient: embargo arabe suite à la guerre du Kippour, puis révolution iranienne et guerre Iran-Irak. La conséquence de la hausse très importante du prix du pétrole a été le développement de nouveaux types de ressources, notamment en mer, et une réduction de la part des pays de l'OPEP, qui en ont pris la pleine mesure. Il en a résulté une longue période de contre-choc pétrolier, qui a fortement ralenti les efforts engagés pour réduire la dépendance de l'économie vis à vis du pétrole. Vers 2008, une nouvelle augmentation spectaculaire du prix du pétrole a été due d'une part au ralentissement des investissements au cours des années antérieures et d'autre part à une flambée spéculative. La chute actuelle est due au ralentissement de la demande, lié à la crise, mais surtout à la volonté de l'Arabie Saoudite d'éviter une augmentation trop importante de la production en dehors de l'OPEP.  En refusant de baisser sa production et en acceptant une chute spectaculaire des cours, l'Arabie Saoudite entend porter un coup fatal à toutes les tentatives d'augmenter substantiellement la production de pétrole "technologique", notamment le pétrole de roche-mère,  ainsi que d'autres formes d'énergie et notamment les énergies renouvelables. Cela ne signifie pas pour autant que les ressources pétrolières ont augmenté par miracle et qu'il n'y a plus à craindre de peak oïl dans les années à venir. En fait, si ce contre-choc se poursuit, il risque d'alimenter une crise future d'une ampleur sans précédent.