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mardi 8 août 2017

Entropia, une utopie de notre temps / Entropia, an utopia in our time

Five centuries after the first publication of The Utopia of Thomas More, the Australian author Samuel Alexander has created a new utopia, he called Entropia. This utopia is organized on an island, isolated from the rest of the world. Living himself in an island, the author reminds us that this is the ideal framework to design a utopia. A island allows the endemism to thrive, allowing some species to develop away from the rest of the world. Thus, Australia has been able to to keep marsupials which have disappeared from the rest of the world. The community of Entropia is supposed to have been created by 2030, in the wake of the collapse of the industrial civilization. The story begins in the 20th century with the purchase of an island in the South Pacific by an oil Tycoon, who is unhappy with his past life and wants to organize an ideal Community, which might become happy and autonomous. The global collapse happens 70 years later. The island is isolated and becomes a real utopia, working with its own rules. The way it is organized is obviously at the heart of the book. It has adopted  a "stationary economy", making a strict balance between resource consumption and renewable natural contributions. To get there, Entropia practice the principles of voluntary simplicity and frugal abundance. These principles are lived as an asset, rather than as a constraint, as they have beneficial effects on health and help to get an easier access to cultural activities. Political organizations are based on a system of "direct" and "participatory" democracy. A minimum income is guaranteed to all inhabitants. Entropia provides a current summary of the ideas that focus on ecology, degrowth, sobriety and sustainable consumption. The merit of the book is to present them as part of a narrative that is attractive and easy to read. As with all utopias, one of the question which the book raises is to know whether such a model is achievable, at least partly. Can everybody accept the principles of voluntary simplicity? One of the interesting answers of the book is to connect the ethics of simplicity to a spiritual quest for the meaning of life. Such a motivation is not easily transferable to the entire population. The author is probably not certain himself that it is feasible, as it is shown by the unexpected conclusion that it will be possible to discover by reading this endearing book.

Cinq siècles après la première publication de L'Utopie de Thomas More, l'auteur australien Samuel Alexander a imaginé une nouvelle utopie, qu'il a appelée Entropia. Cette utopie s'organise sur une île, isolée du reste du monde. Habitant lui-même une île, l'auteur nous rappelle que c'est là le cadre idéal pour concevoir une utopie. L'île permet à l'endémisme de s'épanouir, comme l'avait rappelé Gilles Clément dans "Le Jardin planétaire", en donnant à certaines espèces la possibilité de se développer à l'abri du reste du monde. C'est l'endémisme qui a permis notamment à l'Australie de conserver des marsupiaux qui ont disparu du reste du monde. La communauté d'Entropia est censée avoir été créée vers 2030, dans le sillage de l'effondrement de la civilisation industrielle. L'histoire commence au XXe siècle avec l'achat d'une île dans le Pacifique Sud par un magnat du pétrole, qui, pris de regrets à l'égard de sa vie passée, souhaite organiser une communauté idéale, heureuse et autonome. Mais ce n'est que 70 ans plus tard qu'intervient la "Grande Rupture", c'est à dire l'effondrement planétaire. L'île se retrouve isolée et se transforme ainsi en une véritable utopie, fonctionnant avec ses propres règles. La description de l'utopie est évidemment au cœur de l'ouvrage. L'idée principale autour de laquelle elle s'organise est celle d'une "économie stationnaire", réalisant un strict équilibre entre la consommation de ressources et les apports naturels renouvelables. Pour y parvenir, Entropia pratique les principes de la simplicité volontaire et de l'abondance frugale.  Ces principes sont vécus comme un bien, plutôt que comme une contrainte, car ils ont des effets bénéfiques sur la santé et permettent de se consacrer plus librement à des activités culturelles. Les organisations politiques sont fondées sur un système de démocratie "directe" et "participative". Un revenu minimal est garanti à tous les habitants. Entropia se présente donc un condensé des idées actuelles sur l'écologie, la décroissance, la sobriété et la consommation durable. Le mérite de l'ouvrage est de les présenter dans le cadre d'un récit attrayant et facile à lire. Comme pour toutes les utopies, une des questions qui restent ouvertes est de savoir si elle est effectivement réalisable, ne serait-ce qu'en partie. Est-il  possible de faire accepter par l'ensemble de la population les principes de la simplicité volontaire? L'une des réponses intéressantes de l'ouvrage. est de relier l'éthique de la simplicité à la quête spirituelle du sens de la vie. Une telle motivation n'en reste pas moins difficile à étendre à tous. L'auteur en est conscient lui-même. Il livre un dénouement inattendu qu'il sera possible de découvrir en lisant cet ouvrage attachant.

dimanche 30 avril 2017

L'entropie et l'avenir de l'énergie / Entropy and the future of energy

Reducing the energy consumption becomes a necessity for avoiding both the environment destruction and the depletion of natural resources. Still, due to the energy conservation principle, energy is not really "consumed". When it is used, it is transformed into lower quality energy, which means that the fraction of the energy which can be transformed into work becomes lower. This loss of quality is due to the production of entropy. According to the second principle of thermodynamics, the entropy of an isolated system can only increase. The entropy provides a measure of the amount of disorder within a system. It means that within an isolated system, human activity can only lead to an increase of disorder. It is the reason why energy and other natural resources cannot be indefinitely reused. N. Georgescu-Roegen was the first to understand the meaning of an increased entropy generation and to introduce this concept in economy.  Entropy generation is due to the consumption of energy and to the release of waste in the environment. For this reason, the « degrowth » supporters consider that the only possible remedy consists in reducing the level of consumption, starting first with most developed and richest countries. Natural ecosystems are able to do this, by using the sun energy they receive. If non polluting energy is available, it becomes possible to lower the entropy of a non insulated system. Therefore, in order to ensure the proper functioning or the technical and economic system, it is possible either to reduce the consumption of energy and the production of entropy, or to accept a high production of entropy, which must be compensated by a high input of energy. The first degrowth scenario is well  adapted to the use of renewable energy sources, due to the difficulty to supply a high amount of energy for each inhabitant with such sources (as they require ground area and materials the amounts of which are limited). The second scenario requires a high amount of concentrated energy, which might be provided in the future by nuclear fission or fusion reactors It means that such an energy should become safe, economic and socially acceptable, which cannot be taken for granted today. Furthermore, a highly concentrated and widely available energy source might be used for destructive purposes. Thus, although using less resources under fair conditions at the world level might seem  an utopia, the alternative scenario of a continuous growth of the energy consumption might prove to become a dystopia.

Il devient impératif de réduire la  consommation d'énergie à la fois pour préserver l'environnement et tenir compte de l'épuisement futur des énergies fossiles. Toutefois, l'énergie se conserve et n'est donc pas véritablement "consommée". Par contre, lorsqu'elle est utilisée, elle se dégrade, suivant le second principe de la thermodynamique. Elle finit par être rejetée sous forme de chaleur à la température ambiante et ne peut plus être réutilisée. La dégradation de l'énergie est liée à la production d'entropie. Le second principe de la thermodynamique spécifie que l’entropie d’un système isolé ne peut que croître. L’entropie d’un système mesure son niveau de désordre et la croissance de l’entropie signifie que le désordre à l’intérieur d’un système isolé ne peut qu’augmenter. Ainsi, « dans le contexte de l’entropie, chaque action de l’homme ou d’un organisme, voire tout processus dans la nature ne peut aboutir qu’à un déficit pour le système total ». La loi de l’entropie est donc à l’origine de la rareté économique. C’est elle qui empêche de réutiliser les ressources naturelles qui ont été consommées. Pour limiter la consommation d'énergie, il faut réduire la production d'entropie. N. Georgescu-Roegen a été le premier à concevoir la portée très générale de la génération d’entropie et à introduire ce concept dans le champ de l’économie. La génération d’entropie est liée d’une part à la consommation d’énergie et d’autre part au rejet de déchets dans l’environnement. Partant de ce constat et de l’idée que toute activité humaine génère plus de désordre dans l’univers, les partisans de la « décroissance » considèrent que dans ces conditions le seul remède possible consiste à réduire les niveaux de production et de consommation, en priorité bien sûr dans les pays les plus développés et les plus riches.  

samedi 15 octobre 2011

Echapper au goufre entropique / Escaping the Entropy Abyss


L’économiste N. Georgescu-Roegen a été le premier à concevoir la portée très générale de la génération d’entropie et à introduire ce concept dans le champ de l’économie. Il a montré que toute activité humaine produit des changements irréversibles dans la nature, en générant de l’entropie, c'est-à-dire plus de désordre dans l’univers. La génération d’entropie est liée d’une part à la consommation d’énergie et d’autre part au rejet de déchets dans l’environnement [1]. La génération d’entropie résultant des activités humaines peut paraître irrémédiable et même incompatible avec tout développement durable à long terme. Partant de ce constat, N. Georgescu Roegen en a conclu que le seul remède possible consiste à réduire les niveaux de production et de consommation, en priorité bien sûr dans les pays les plus développés et les plus riches [2]. Il a été ainsi le précurseur des théories de la décroissance. Le concept de décroissance a ensuite inspiré tout un mouvement d’opinion qui défend une vision alternative de l’économie [3], [4]. La question se pose toutefois de savoir si l'engloutissement dans le« gouffre entropique », selon l’expression utilisée par Jeremy Rifkin [5] est inéluctable.Pour y échapper, il existe en fait trois moyens.