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samedi 1 octobre 2011

La dystopie est-elle l'avenir de l'utopie? / Is dystopia the future of utopia?

Since antiquity, thinkers, architects and philosophers  have tried to imagine the city of the future. Plato  was one of the first great thinkers to imagine the ideal city of the future. Thomas More coined the word of Utopia in 1516. A century later, Campanella described the "City of the Sun", hoping to achieve his project through the progress of science. During the XIXth century, socialist utopias such as those described by Charles Fourier or Saint-Simon flourished. When the fascist and communist utopias were  implemented, a wide gap appeared between the "radiant future" which was promised and the bleak reality. Already in 1920, in his novel "We", the russian writer Zamiatine presents a society entirely controlled by the state, through a system similar to the Panopticon concept of Jeremy Bentham. In his novel, "Brave New World", Aldous Huxley had in mind the fascist system. In George Orwell's "1984", society is under the control of the "Big brother".This shift from utopias to dystopias is characteristic of the moral crisis of present times. It is now difficult to think about the future in positive terms. Dostoievsky had announced already a long time ago, the failure of the "Crystal palace". Human psychology does not fit with a purely rational way of life, not taking into account human aspirations for liberty. Dystopia can be more fascinating than utopia. The punk culture with its taste for trash illustrates this fascination. For those who accept such a situation, it also offers opportunities for striving and surviving.

Dès l’antiquité, penseurs, architectes et philosophes ont essayé d’imaginer le « cité de demain ». Tout projet de construction d'une société nouvelle est qualifié d'« utopie », lorsqu’il ne se réalise pas. Pourtant, toute conception de l’avenir, est porteuse d’avenir. Elle est susceptible de se réaliser, ce qui la fait passer de l’utopie à la réalité. Ainsi quand Hippodamos réalise à Milet un plan en damier, il rêve sans doute d’une ville idéale, qui aurait pu rester une utopie[1]. Mais ce plan a été réalisé et il a servi à de nombreuses autres villes de la Rome antique, jusqu’à aujourd’hui.

Platon a été un des premiers à concevoir une cité idéale, dont il décrit le mode de fonctionnement. Cette cité comprend trois classes de magistrats, soldats et ouvriers. Elle opère sur un mode qui peut être qualifié de communiste et pratique la communauté des biens, des femmes et des enfants, sous la conduite des philosophes magistrats. Conformément à beaucoup de modèles d’utopies qui vont suivre, Platon est prêt à sacrifier le modèle de la cellule familiale, pour parvenir à une situation qu’il estime plus rationnelle.
   En Angleterre au XVIe siècle, le chancelier Thomas More est le premier à rédiger un traité présentant un modèle d’Utopie, selon un terme qu’il est également le premier à inventer et à utiliser. Sa cité idéale abolit la division en classes sociales. Les maisons sont toutes semblables, mais pour renforcer encore l’égalité entre tous, tous les dix ans, on procède à un déménagement général, toutes les maisons étant réparties par tirage au sort. Thomas More, à la différence de Platon, admet les familles et leur confère même un rôle important, en leur attribuant la conduite de la Cité. Près d’un siècle plus tard, le moine italien Campanella rédige en prison un autre projet d’Utopie, qu’il baptise « Cité du Soleil ». Campanella qui préconise une économie planifiée et collectiviste, se passionne pour la science et la technique. Il La ville qu’il imagine est une vitrine de la science et utilise toutes les ressources de la technique du temps.
   Ces utopies pourraient n’apparaitre que comme de simples fictions. Pourtant, un certain nombre de projets de « cité idéale » se réalisent. Ainsi, au début du XVIIe siècle, pratiquement au même moment que Campanella publiait sa « Cité du soleil », les jésuites obtiennent la possibilité, grâce à une ordonnance royale, de gouverner des territoires au Paraguay, où ils installent leurs missions. Ils sédentarisent les indiens guaranis convertis au sein de « réductions » qui sont organisées comme des cités idéales. Les jésuites divisent les terres en un secteur communautaire et un secteur individuel. Ils organisent des services publics, des écoles, des hôpitaux. La peine de mort est abolie. Les réductions ont pu survivre pendant près d’un siècle et demi. Les jésuites sont expulsés du Paraguay en 1767 par les Portugais auxquels les Espagnols avaient cédé le Paraguay.
   Au XIXe siècle, le développement des idées socialistes ouvre la voie à de nouvelles utopies. Une des utopies les plus élaborées est celle de Charles Fourier qui prévoit de faire cohabiter 400 familles dans un ensemble de bâtiments au milieu d’un domaine agricole de 400 hectares. Cette communauté se livre aux jouissances sexuelles et culinaires. Malgré de nombreuses extravagances, qui consistent par exemple à vouloir déplacer l’axe de la Terre, ou à installer en permanence une aurore boréale au dessus du pôle Nord, pour modifier le climat, Fourier trouve de nombreux adeptes. De nombreux phalanstères sont créés en France et même aux États-Unis. Ils échouent plus ou moins rapidement, mais une expérience de familistère conduite par le fabriquant de matériel de chauffage Jean-Baptiste Godin, inspirée par les idées de Charles Fourier a perduré sous forme de coopérative jusqu’en 1968.
   Au XXe siècle, l’enthousiasme militant qui guidait les auteurs des utopies socialistes ou anarchistes faiblit.. Les formes prises par la société de consommation naissante et le succès des théories de l’eugénisme inspirent à l’écrivain britannique Aldous Huxley le « Meilleur des Mondes »[2]. Dans cet ouvrage écrit en 1931, les êtres humains résultent d’une procréation artificielle et dès leur conception sont répartis selon un système de castes qui va des individus alpha programmés grands, beaux et intelligents pour former l’élite dirigeante aux individus delta et epsilon, qui forment les castes les plus basses et exercent les fonctions manuelles. L’enseignement utilise des méthodes hypnotiques pour conditionner tous les individus. 
    Au cours du XXe siècle, certaines "utopies" fascistes ou communistes se réalisent. La concrétisation de ces "utopies" fait apparaître un immense écart  entre "l'avenir radieux" promis par les promoteurs de ces systèmes et la réalité. Le régime soviétique qui s’est mis en place en URSS, suite à la révolution d’octobre s’avère être un régime totalitaire qui supprime les libertés et emprisonne ou exécute les opposants. 
   Les utopies sont de plus en plus souvent remplacées par des « dystopies », qui dépeignent un avenir sombre, soumis au joug d’une dictature. L'écrivain russe Ievgueni Zamiatine écrit «  Nous autres »[3] dès 1920, roman dans lequel il décrit un État contrôlant toute l’existence de ses citoyens, dont la vie privée est abolie, système de prison collective à l'image du Panoptique de Jeremy Bentham, qui permet au surveillant de voir à tout moment tout ce qui se passe.. Le roman « 1984 » écrit par Georges Orwell s’inspire du régime stalinien pour décrire une société, placée constamment sous le regard inquisiteur de « Big Brother »[4]. Ces récits sont révélateurs d’un changement de perspective. A la foi dans les progrès de la science et de la technique ou à l’espoir d’un socialisme radieux, ont succédé un doute profond quant à leurs effets ainsi qu’une appréhension plus globale vis à vis de l’avenir. 
    Ce basculement, qui nous a fait passer du monde des "utopies" à celui des "dystopies", est révélateur du malaise de la société contemporaine et d'une "crise de civilisation ", qui ne permet plus de penser à l'avenir en termes positifs. Dostoïevski avait déjà annoncé l'échec du "palais de cristal", de la ville idéale entièrement protégée de l'extérieur par un globe de verre. La dystopie exerce une fascination parfois plus grande que la cité idéale. Il avait mis en avant le peu d'attrait pour le psychisme humain d'un système purement rationnel. La fascination exercée par le trash et le punk en est un exemple. Dès lors, il ne reste pour certains qu'à considérer le monde dystopique comme un nouvel écosystème, dont il faut exploiter les failles.

[1] Gilles Lapouge, Utopie et civilisations, Librairie Weber, 1973
[2] Aldous Huxley, Brave New World, Harper & Row, 1958, traduit en français : Le Meilleur des mondes, Pocket, 2002(Poche)
[3] Eugène Ivanovitch Zamiatine, Nous autres, écrit en russe en 1920, traduit en français et publié dans la coll. L’Imaginaire, Gallimard-Jeunesse, 1971
[4] Georges Orwell, Nineteen Eighty-Four, Secker and Warburg, London,1949, traduit en français:: 1984, Gallimard Folio, 1972 (Poche)
[5] H.G. Wells, Anticipations of the Reaction of Mechanical and Scientific Progress Upon Human Life and Thought, 1901, new edition: Dover Publications, 1999


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